Lulu a vu
  • Home
  • Critiques théatrales
  • Musique & Danse
  • Expositions
  • Ecrire à Lulu

Votre Maman de Jean-Claude Grumberg, mise en scène Charles Tordjman, avec Catherine Hiegel,  Bruno Putzulu et Philippe Fretun, au théâtre de l'Atelier.

25/4/2017

1 Commentaire

 
Le meilleur de Grumberg,
Du grand Hiegel
Atteinte d’Alzheimer, «  Votre Maman » se révèle ingérable à en croire les plaintes répétées du directeur de la maison médicalisée à chacune des nombreuses visites de son fils.
Cela débute par un « détournement » de chaise roulante pourtant indispensable à un monsieur qui « lui, a toute sa tête mais plus ses jambes ».
 Amusée par cette note de fantaisie égayant sa routine, la vieille femme, «  La seule à marcher encore sur ses deux fémurs »,  s’y est obstinément accrochée durant toute la journée en dépit des nombreuses tentatives du personnel soignant.
A l’intervention du fils considérée comme dernier espoir par le directeur excédé, la récalcitrante, péremptoire, réplique avec l’autorité d’une logique imparable :
« Les chaises sont à tout le monde, si je suis assise dessus, elle est à moi »
Une extraction physique sans succès parachève cette première scène tragi-comique de la plus pure veine grumbérienne.
J’arrête là afin de conserver tout leur sel aux  tableaux qui suivront.
Tels de véritables détonateurs d’hilarité, fusent les répliques percutantes au sceau de l’absurde ; S’enchainent les situations au rythme des visites et des dialogues de sourds entre le directeur et le fils, le fils et sa mère.
La «  banalité » des conversations révèlera cependant, comme une déchirure qui va s’élargissant, la faille jamais refermée dans la vie de la vieille dame.
Imperceptiblement, se dessineront les évènements d’un passé tragique dont les circonstances n’ont cessé de hanter son existence.
Devenues toujours plus lourdes à porter, elles finiront de provoquer sa tragique disparition au cours d’une impossible quête de retour au passé.
D’irrationnelle, le dénouement fera soudain basculer la maladie sous le seul prisme de la douleur, « rationnelle ». 
Une ultime réplique dans la bouche du fils permettra alors au dramaturge, pudique et concis, d’atteindre à l’universel à partir du particulier.

Catherine Hiegel retrouve un auteur qu’elle a déjà interprété en donnant la réplique à Pierre Arditi dans «  Moi je ne Crois pas » encensé en son temps dans cette même chronique ( Lulu de Février 2012)
Ce nouveau personnage semble avoir été créé pour elle.
Fascinante tout au long de la soirée, drapée frileusement dans son vieux manteau beigeasse trop grand pour elle, chaussée de ses caoutchoucs dans la même couleur indéfinie, le cheveu long et triste, regard perdu ou accès de vivacité retrouvée.
Autoritaire et méprisante, le ton rogue et le verbe assassin, violente quand elle sent son « territoire menacé » (en l’occurrence ses toilettes privées) se défendant de l’envahisseur à coups de parapluie : elle provoque l’antipathie, au mieux le rire moqueur.
Ses accès de tendresse non feinte nous émeuvent soudain,
Quand petit à petit elle lâche quelques bribes du passé, tour à tour désabusée, méfiante ou soupçonneuse, ses absurdités deviennent bouleversantes.
Harcelé par le directeur, fils dévoué, protecteur et aimant, Bruno Putzulu campe parfaitement ce personnage à la patience durement éprouvée, pris en étau entre sa mère et le directeur, en permanence agressé, subissant les récriminations de tout bord, ne sachant plus à quel saint se vouer.
Caricature vivante, Philippe Fretun incarne ce directeur plus obsédé de rentabilité  que préoccupé du bien-être de ses pensionnaires. Rougeaud, faussement chic sanglé dans son costume trop serré bleu, il souffle, soupire, s’époumone toujours, en vain…
​
Sous l’excellente direction de Charles Tordjman et dans le décor de Vincent Tordjman, le trio évolue devant de hauts éléments blancs et fins qui suggèrent l’espace médical. Posés devant une toile de fond verdoyante, jardin ou parc, ils ne s’écarteront qu’à la fin, découvrant au fils accablé, un dénouement «fantomatique ».
Voilà des décennies que nous connaissons les obsessions de Jean-Claude Grumberg et son art unique de les exorciser par le rire, la dérision, l’absurde poussé à son paroxysme.
De « l’Atelier », «  Rêver peut-être » en passant par «  Zone libre » «  La leçon de Savoir Vivre », «  L’enfant Do » et «  Pour en Finir avec la Question Juive » pour ne citer que quelques titres de ses pièces les plus réussies, il est bien «  L’auteur tragique le drôle de sa génération » comme le définissait Claude Roy.
L’octogénaire n’a rien perdu de son humour dévastateur.
«  Votre Maman » en est la dernière et brillante confirmation.
Foi de Lulu, vous ne pouvez pas être déçus.
1 Commentaire
Angelo
6/5/2017 02:17:39 am

Tu as raison !! J ai passé un bonne soirée malgré un thème lourd !! Tous les acteurs magnifique et une subtile mise en scène!!amities!!

Répondre



Laisser un réponse.

    Critiques théâtrales

    Archives

    Mai 2025
    Avril 2025
    Mars 2025
    Février 2025
    Janvier 2025
    Décembre 2024
    Juillet 2024
    Juin 2024
    Mai 2024
    Avril 2024
    Mars 2024
    Février 2024
    Janvier 2024
    Décembre 2023
    Novembre 2023
    Octobre 2023
    Septembre 2023
    Juin 2023
    Mai 2023
    Avril 2023
    Février 2023
    Janvier 2023
    Décembre 2022
    Novembre 2022
    Octobre 2022
    Juin 2022
    Mai 2022
    Avril 2022
    Mars 2022
    Février 2022
    Janvier 2022
    Décembre 2021
    Novembre 2021
    Octobre 2021
    Octobre 2020
    Juin 2020
    Avril 2020
    Février 2020
    Janvier 2020
    Décembre 2019
    Novembre 2019
    Octobre 2019
    Septembre 2019
    Mai 2019
    Avril 2019
    Mars 2019
    Février 2019
    Janvier 2019
    Décembre 2018
    Novembre 2018
    Octobre 2018
    Juin 2018
    Mai 2018
    Avril 2018
    Mars 2018
    Février 2018
    Janvier 2018
    Décembre 2017
    Novembre 2017
    Octobre 2017
    Septembre 2017
    Juin 2017
    Mai 2017
    Avril 2017
    Mars 2017
    Février 2017
    Janvier 2017
    Décembre 2016
    Novembre 2016
    Octobre 2016
    Septembre 2016
    Juillet 2016
    Juin 2016
    Mai 2016
    Avril 2016
    Mars 2016
    Février 2016
    Décembre 2015
    Novembre 2015
    Octobre 2015
    Septembre 2015
    Juin 2015
    Mai 2015
    Avril 2015
    Mars 2015
    Février 2015
    Janvier 2015
    Décembre 2014
    Novembre 2014
    Octobre 2014
    Septembre 2014
    Juillet 2014
    Juin 2014
    Mai 2014
    Avril 2014
    Mars 2014
    Février 2014
    Janvier 2014
    Décembre 2013
    Novembre 2013
    Octobre 2013
    Septembre 2013
    Juillet 2013
    Juin 2013
    Mai 2013
    Avril 2013
    Mars 2013
    Février 2013
    Janvier 2013
    Décembre 2012
    Novembre 2012
    Octobre 2012
    Septembre 2012
    Juillet 2012
    Mai 2012
    Avril 2012
    Mars 2012
    Février 2012
    Janvier 2012
    Décembre 2011

    Photo
Propulsé par Créez votre propre site Web à l'aide de modèles personnalisables.