Qu’on se rassure :
Force comique intacte,
L’ouvrage n’a pas pris une ride,
Et la nouvelle distribution ravit.
Non dénué de mélancolie, de causticité et d’ironie, sur un registre doux-amer, voire désabusé, se dissimule la tendresse des auteurs pour leurs personnages tournés en dérision, moqués, démasqués.
Supposé moment d’harmonie familiale, contre toute attente un diner d’anniversaire servira de détonateur aux règlements de compte de la famille Menard.
Mené avec sensibilité et pudeur, par un jeu subtil de basculement, sous la noirceur des rancunes, se profilera la victoire des perdants.
Catherine Hiegel est parfaite dans sa petite veste Chanel, cœur desséché, blessante, assenant ses certitudes, affirmant ses préjugés, affichant sans fard ses préférences, sa passion pour les chiens.
Léa Drucker, comédienne appréciée de longue date par Lulu, est véritablement grandiose en Yo-Yo. Irrésistiblement comique, toute de pastel vêtue, elle joue admirablement les sottes naïvement déçues : la scène de l’ouverture des cadeaux restera, comme ses réflexions d’après-repas de fête.
En vieil ours grognant toujours sans mordre jamais, Grégory Gadebois révèle cette fois encore toute l’humanité profonde, touchante, du personnage blessé, fils méprisé, mari abandonné.
Il faut l’entendre houspiller son serveur, gronder son chagrin, s’enferrer dans l’incompréhension.
A leurs côtés,
Dosant sans outrance toute l’agressivité qui l’habite, Nina Meurisse est une fille rebelle attachante,
Laurent Capelluto, serveur indolent, intellecto et intrusif, ne manque pas de présence comme Jean-Baptiste Marcennac, le « fils préféré » et « mari modèle »
Pour donner corps à l’atmosphère du spectacle, la salle démodée du « Père Tranquille » aux murs ornés de frisette, avec sa cabine de téléphone en plein milieu et son juke-box enrayé, Alban Ho Van parvient à occuper l’immense plateau du théâtre, et Claire Raoul signe des costumes parfaitement dans la note.
Réunir intelligence et divertissement,
Voilà le pari réussi.
Un spectacle à ne pas manquer.