Ce conte est gai et cruel à la fois.
L'histoire nous plonge au coeur d'une population truculente et joyeuse en dépit du racisme dont est l'objet et de la misère qui l'accable.
Dans ces quartiers noirs de Sophiatown, condamnés à la destruction par les blancs, un jeune couple semble vivre le parfait amour.
Un jour pourtant Philémon découvrira sa Mathilda adorée au lit avec un amant qui abandonne son costume en prenant la fuite.
Le mari trompé imaginera une vengeance aussi singulière que dévastatrice: le costume oublié partagera désormais chaque instant de la vie du couple, de son intimité la plus profonde jusqu'à la fête où viendront toutes les connaissances et amis du ménage.
Le dénouement sera fatal à Mathilda.
Elle ne survivra pas à cette tacite et ultime humiliation publique.
Peter Brook fidèle à ses idées, avait seulement utilisé quelques portants et quelques chaises colorées pour figurer le décor.
Les comédiens noirs étaient parfaits.
L'histoire bouleversante de simplicité et de désespoir contenu.
Aujourd'hui les interprètes sont aussi remarquables, vivants, charmeurs, attachants, émouvants.
Mais Peter Brook a rajouté à sa mise en scène d'origine une "mise en musique" avec la collaboration de Marie Hélène Estienne et Franck Krawczyk.
Trois musiciens-comédiens jouent aussi bien du Schubert que des chansons africaines interprétées par la voix superbe de Nonhlanhla Kheswa, dans le rôle de Mathilda.
Cet ajout ne se justifie pas.
Il n'en résulte à mes yeux qu'un très regrettable ralentissement de l'action dramatique, et si les chansons de Miriam Makéba peuvent trouver leur place ici, on s'interroge sur la nécessité de la musique de Schubert de surcroît mal jouée.
Ce "délayage" est bien inutile.
Mais le public semble conquis et une fois encore je vais passer pour une grincheuse.