Forte de mon admiration sans réserve pour " Paroles gelées " ( Lulu d'Or en 2012) je vous ai recommandé dans mon mail de rentrée cette reprise du premier spectacle du nouveau directeur du T.G.P.
Me voilà contrainte de revenir sur ce jugement prématuré.
Assurer quatre heures de représentation est un défi en soi.
Il n'a pas effrayé nos deux compères : Jean bellorini et Camille de la Guillonnière, co-signataires de cette adaptation théâtrale des " Misérables".
Confiants en ces jeunes talents, nous voilà embarqués dans l'aventure.
Dans un décor totalement dépouillé, accompagnés de deux musiciens, avec la participation de seulement deux comédiens, Clara Mayer et Camille de La Guillonnière, tour à tour récitants et acteurs des différents rôles, la première partie retrace avec vivacité et émotion les aventures de ces malheureux Jean Valjean, Fantine, Cosette, Javert, etc. Emportés par ce récit maintes fois conté, émus par ces personnages maintes fois interprétés à la scène et à l'écran, nous demeurons prêts pour la suite de cette " épopée ".
Délibérément plus longue, la deuxième partie repose pour l'essentiel sur " l'engagement révolutionnaire " de l'œuvre du grand écrivain.
Mais un texte littéraire, aussi romanesque soit-il, ne sera jamais, par définition, un texte théâtral.
Souvent dénoncées, là, résident les limites de l'exercice.
Bien vite la pièce s'enlise dans le récit linéaire du roman, avec ses interminables digressions psychologiques et descriptives, sans parvenir jamais à nous faire partager, ni la passion dévorante de Marius, ni le " feu " qui anime ces belles âmes généreuses et révolutionnaires, la grandeur des sacrifices de nos héros en guenilles, ni leurs déchirants dilemmes.
En dépit des intermèdes musicaux, dont le tintamarre couvre parfois le texte, de certains effets de lumières assez réussis, du renfort de trois comédiens supplémentaires( sans grand talent) pour " étoffer " le jeu, d'héroïque, l'aventure devient fastidieuse, de flamboyante, l'action réduite à la monotonie.
La " Tempête sous le crane " tant attendue se révèle, non pas la houle qui vous emporte, mais un morne clapotis qui vous ballotte, vous laissant abattu.
Nouvelle déception.
Mauvais augure pour la prochaine programmation de Jean Bellorini.
Je ne demande qu'à être détrompée.