L’adaptation déçoit.
Les questionnements, les crises, les incompréhensions et les aspirations de toute vie conjugale par eux interprétées, laissant dans nos mémoires leur empreinte indélébile, avaient atteint chacun de nous au plus profond.
Le texte de Bergman, lucide, sans concession, si comique parfois, tendre aussi témoigne d’une rare, sensible connaissance des inévitables difficultés d’une vie à deux, scandées par ses soubresauts, ses aspirations, ses déchirements, ses cruautés, ses élans de tendresse, jusqu’à sa violence.
Une vidéo de chacun des comédiens est projetée en ouverture de spectacle.
Filmés séparément, de près et de face, ils se présentent à nous.
Bienvenue chez Marianne et Johan, jeune couple qui semble comblé par la vie.
Belle comme le jour, frémissante, forte et vulnérable, Laetitia Casta est cette femme intègre, sincère, exigeante, blessée, pure. Dans les premières séquences, cheveux relevé et en pantalon, d’une fraicheur confondante, elle cherche, tâtonne, doute la première.
« Je n’ai rien vu venir, c’est monstrueux » s’écrie-telle horrifiée au moment où Johan la quitte pour une autre.
Couard, empêtré dans ses contradictions, un peu veule, dissimulateur, incroyablement égoïste, Johan n’hésite pas à sacrifier sa famille à son soudain désir de « liberté » qu’il finira par regretter, et cher payer. L’homme n’a pas le beau rôle dans l’histoire. Mufle, balourd, parfois simpliste, Raphaël Personnaz sait parfaitement lui conférer ses côtés patauds, ses maladresses toutes masculines, sa brutalité : « Pour aimer il faut un don, je ne l’ai pas » résume-t-il.
Pour nous faire percevoir l’atmosphère nordique, une grande baie ouvre sur des arbres sans feuilles sous un triste ciel d’hiver, des oiseaux figés en vol.
Deux socles de bois clair sur scène symbolisent tous les meubles.
Pour faire plus branché sans doute, l’adaptation de Safy Nebbou fait la part belle aux expressions « familières » voire aux vulgarités de langage.
Explications, confrontations, abandon, provocation, réconciliation, interrogations se succèdent.
Tel le piège fatal de toute vie à deux, insidieusement, la lassitude finit par gagner aussi le spectateur.
Voulus par la mise en scène de Safy Nebbou, le réalisme et la modernité affichés privent les acteurs de cette densité si bouleversante qu’animait Nicole Garcia et André Dussolier.
Y triomphait alors toute l’infinie complexité de l’humain.
Tout l’opposé d’un « reality show ».
Mais que ne pardonnerait-on pas à un couple si « glamour » !