Fiasco final
En tout point différente de la création récente de la Comédie Française, la dramaturgie de David Bobée, dans sa sombre beauté, sa modernité et son dépouillement , séduit, convainc, envoute pendant le deux premiers actes de cette « Lucrèce » tant attendue.
Grotesque, risible, outrancier, et désastreux, le troisième acte nous transporte soudain à la fête chez Michou…
Gentilshommes affublés de robes pitoyables, Princesse Negroni ressemblant à une prostituée, acrobates exécutant de pauvres cabrioles, musique assourdissante, plongeons et aspersions en tous genres, coups de révolver répétés, transforment le dénouement en péripétie comique, la tragédie en scène de cirque.
Hypothéquée par une distribution médiocre dans l’ensemble, certains acteurs inaudibles, la Lucrèce de Béatrice Dalle, malgré sa corpulence et ses formes plantureuses, ne possède pas la dimension du rôle. Elle n’a ni la présence, ni la force tragique requises par ce personnage fascinant, terrible, redoutable, mère secrètement aimante cependant.
Seuls à se distinguer :
Jérôme Bidaux froid et cynique Gubetta, parfaite âme damnée de Lucrèce, complaisant dans le crime, incrédule face à la mansuétude
Thierry Mettetal , glaçant, incarne avec une grandeur toute aristocratique Don Alfonso d’Este, époux épris, machiavélique dans sa vengeance.
Quittant une salle depuis des mois complète, le privilège devenu traquenard, le désenchantement succédant à l’enthousiasme, Lucrèce gâchée par le Barnum Bobée.