Lulu se devait de «découvrir» le travail de Pauline Bayle sur les «Illusions Perdues» de Balzac.
Bravant un concert de louanges, elle ose faire entendre sa voix discordante
Transposée de nos jours, jouée par une troupe de cinq comédiens trentenaires qui passent d’un rôle à un autre à l’exception de celui de Lucien, l’intrigue se concentre sur l’ascension fulgurante et la chute dramatique du jeune poète provincial dans notre impitoyable capitale.
Les dialogues se veulent des coups de poings.
La mise en scène dénudée se focalise sur la gestuelle,
La scansion d’une musique techno obsède,
Allégorique, une chorégraphie de possédés fait surgir des nuages de poussière du sol.
Une femme, longue chevelure flamboyante portée en tresse ou flottant sur ses épaules, Jenna Thiam, interprète un surprenant Lucien.
Dans le même esprit, deux autres comédiennes, Charlotte Van Bervesselès et Hélène Chevalier, passent crânement des personnages féminins aux masculins sans être forcément crédibles.
Coté messieurs, Guillaume Compiano et Alex Fondja, assurent encore la multiplicité des autres rôles.
Sous la Restauration, dans cette immense galerie de personnages, Balzac compose une fresque impitoyable dénonçant l’avènement de l’argent roi, ses effets dévastateurs.
Abandonné sans ressources à Paris, Lucien, ambitieux, avide de gloire et d’amour en sera une victime prédestinée.
Ballotté, perdu, crédule, il sera tour à tour rejeté par une aristocratie imbue de sa supérioté, séduit par une brillante carrière de journalisme, dupe de fausses promesses, entrainé aux plus viles trahisons, piégé par d’immondes intrigues. Jouet des rédactions et des éditeurs, ruiné, il cause la mort de sa maîtresse, actrice aux mœurs légères mais non moins sincère dans ses sentiments.
Contrairement à la littérature, à sa lecture, pratiques du silence et du «recueillement»,
Le théâtre est un art «visuel» «sonore» et «incarné».
Voilà où le bât blesse.
Sans même évoquer la laideur des costumes,(redoutables robes de scènes pour Coralie, squelette outrageusement décolleté) signés Pétronille Salomé,
Le parti pris de Pauline Bayle nous confronte à des personnages sans chair ni arrière-plan.
Réduits à de vulgaires stéréotypes, comme propulsés sur scène afin de bien nous faire percevoir la noirceur des situations, la pièce tombe dans un didactisme éculé.
Malgré leur indiscutable engagement, les comédiens, exception faite d’Alex Fondja, ne parviennent pas à convaincre, entre dialogue et physique trop souvent incompatibles avec le personnage incarné, toujours évoqué à l’aune d’une modernité insistante.
Les deux heures trente du spectacles s’étirent. monotones, démonstratives.
Ayant débuté avec Christian Schiaretti, Pauline Bayle en a gardé le style.
Une influence qui éclaire les critiques de Lulu.