Avoir choisi La Cartoucherie à Vincennes ne pouvait mieux leur convenir : ce cadre tient de la roulotte, de l’éphémère, de l’inventivité que balaie un souffle d’intelligence et de poésie mêlées.
Créés pour porter le théâtre, comme son nom l’indique, dans les lieux le plus éloignés de l’Hexagone, la compagnie est aujourd’hui dirigée par Robin Renucci.
Plusieurs spectacles se succéderont jusqu’au 2 juillet.
« L’emprise des cerveaux » est le thème choisi pour cette série de représentions.
Angle sous lequel Christian Schiaretti a entièrement placé sa mise en scène.
Le côté « ambulant » de la représentation, bien rendu par un décor de paravents en carton ornés de dessins naïfs au crayon de couleur pour figurer la maison où Agnès est tenue « au secret » et d’arbres pour le parc,
Impression que complète la scène surélevée, faite de planches sonores posées à même le sol, qu’entourent et surplombent des « quinquets » pour un éclairage cru, vacillant parfois, et interrompu à la fin de chaque acte.
Economie d’une la scénographie, à l’instar de Jean Vilar au T.N.P, qui valorise superbement la beauté des costumes d’époque, conférant à chacun des personnages un relief particulier.
Farcesque, caricaturale, la représentation met l’accent sur les travers des personnages : l’abêtissement d’Agnès, la forfanterie de son amoureux Oronte, les ridicules d’Arnolphe, son aveuglement et son obsession, la rouerie des serviteurs Alain et Georgette. Seul personnage épargné : le lucide et sage Chrysalde échappe à satire.
Despotique, colérique, violent, rageur, Robin Renucci est un Arnolphe qui écume avant de s’effondrer.
Jeanne Cohendy, Agnès, la stupidité incarnée, s’éveille au travers de ses émois amoureux,
Comme au guignol, les coups de bâtons pleuvront sur les échines, distribués aux serviteurs Alain, Jerôme Quintard, et Georgette, Laurence Besson, qui les dispenseront aussi sur le malheureux soupirant.
Fat et néanmoins candide, Maxime Mansion nous campe un Horace risible,
D’une justesse et d’une présence remarquable, le Chrysalde de Christophe Palmera, a bien le calme et l’autorité de la raison face à la déraison d’Arnolphe.
Oubliées, bannies, exclues, les blessures, les souffrances et les tortures d’un cœur blessé qui bouleversaient chez l’ Arnolphe de Pierre Santini dans une récente interprétation vue cet hiver au Théâtre 14(Lulu de Novembre 2015).
Amputée de tout un aspect plus profond et plus « humain »,
Plus cérébrale que ressentie
Axée sur le seul registre de la grande comédie,
La pièce gagne en efficacité auprès d’un plus large public,
Il suffit d’entendre les rires d’enfants fuser dans la salle, les tonnerres d’applaudissements aux saluts.
Rendons hommage aux Tréteaux de France :
Contrairement à tant de représentions au seul service d’un metteur en scène narcissique et mégalomane,
C’est Le Théâtre et Le Public, qu’ils honorent
Une mission noblement accomplie ;