Alexis Michalik est l'auteur et le metteur en scène de cette pièce jouée par cinq comédiens jubilatoires: Régis Vallée, Amaury de Crayencour, Evelyne El Garbi Clai, Magalie Genoud et Eric Herson Macarel, des noms qu'il faut retenir.
Sans la moindre fausse note, chacun passe avec un bel ensemble, d'une époque à l'autre, ou échange subtilement leur rôle.
Quelques "travestissements" et quatre tabourets suffisent à nous faire rencontrer, dans le désordre, deux femmes algériennes vivant seules dans le bled, le pape d'Avignon, un fils "paumé" et perdu dans les Ardennes à la recherche du village de son père décédé, Marie-Antoinette et son amie de coeur, les premiers chrétiens de Rome, comme une famille canadienne au parler savoureux.
Fumeuse, décousue, invraisemblable, mais captivante assurément cette histoire.
S'emboitant, se déroulant, et découlant les uns des autres avec une surprenante fluidité, ces aventures incroyables conduisent peu à peu les protagonistes à se trouver eux-mêmes, à découvrir leurs racines.
La vraie beauté de la pièce, comme sa dimension la plus poétique et mystérieuse, réside dans sa célébration du pouvoir salvateur, libérateur et révélateur de l'Ecrit, l'argument même sur lequel repose toute l'action:
"le savoir est la source de la vie" comme le proclame le personnage principal, cet être à la dérive sauvé par la découverte de carnets dans une tombe abandonnée dont le contenu métamorphosera la vie. Alexandre Dumas se révèlerait en être le fossoyeur. Notes jalousement tenues secrètes par l'illustre romancier de son vivant elles relatent l"exis surprenante d'une femme dont la vie même n'est pas certaine.
Beauté du doute, charme de la fiction, confusion des genres, fascination du récit.
Ce texte légèrement raccourci,on tenait là un spectacle de "rêve".
Conteur sachant conter, Alexis Michalik ne devrait se laisser emporter si loin.
Nous l'aurions suivi avec davantage de bonheur encore.