Le Théâtre 13 a souvent des programmations de qualité, nous y avons vu des spectacles intéressants.
Celui-ci semblait prometteur.
La proximité avec Gogol affichée par l'auteur, il souhaitait donner ici une version "américanisée" du Révizor, en situant l'action dans une petite ville endormie de l'Amérique profonde où le maire et son conseil municipal imaginent devenir soudain riches et puissants grâce à la venue providentielle du "Ministre japonais du commerce extérieur".
Le ministre en question n'est qu'un minable comédien, flanqué de sa petite amie. Tous deux sont vêtus de leurs costumes de scène de la revue Miss Saïgon" dont ils viennent de se faire renvoyer. Sans ressources, ils sauront tirer tous les avantages de ce quiproquo cocasse et pathétique où tel est pris qui croyait prendre.
Jouant de la crédulité et de la cupidité de toute la famille de l'édile, le pseudo ministre ira jusqu'à proposer le mariage à la fille du maire, promettant à la famille entière un départ imminent pour le Japon où les attend la grande vie.
L'illusion sera de courte durée: le ministre s'est bel et bien volatilisé, non sans avoir empoché force pots de vin largement distribués par tous les membres du conseil municipal (galerie de personnages tous comiques à la fois méprisables et pitoyables).
Le maire, flanqué de son épouse enfin triomphante, et de sa fille impatiente de convoler, restera face à ses désillusions et à celles de tout son entourage réuni au grand complet dans l'attente de ce départ grandiose.
L'apothéose vire au naufrage.
Les rêves les plus fous réduits à néant.
Cela devrait fonctionner à merveille.
Le texte est bon, le développement dramatique bien mené, la description de la situation juste, corrosive et non dénuée d'une certaine empathie pour des personnages somme toute minables et comiques.
Et on ne rit pas. Invraissemblable, non!
Ne soyons pas trop sévère avec tous les comédiens, certains ne déméritent nullement, notamment les interprètes des frères Chichinsky dans leur superbe numéro de Dupont-Dupond, le maire réellement touchant dans la dernière scène et le docteur qui préfère à ses malades ses deux chiens. Les autres desservent réellement leur personnage respectif. Le décor n'arrange guère les choses, il ne rappelle en rien ce qui compose les caractéristiques d'un intérieur américain moyen dans les années 90.
A vrai dire, seules responsables la mise en scène et la direction d'acteur privent la pièce de son efficacité, lui interdisant de résonner comme elle devrait.
Le théâtre est le résultat d'une alchimie subtile.
Cette soirée en est l'illustration regrettable.
Grâce à notre souvenir ému du "Regard" monté en 2003 on sait que Murray Schisgal est un bon auteur.
N'oublions pas de préciser que le grand Laurent Terzieff en était l'interprète de référence.