Exquis, enlevé, spirituel, pénétrant et lucide, tout l'esprit de Marivaux s'y déploie avec grâce.
Un legs contraint le marquis, épris de la comtesse, à épouser Hortense, amoureuse du séduisant mais désargenté chevalier.
La comtesse, restée veuve, soupire pour le marquis. Le marquis éprouve de très tendres sentiments pour la comtesse. Aucun ne parvient à se déclarer. Par l'entremise de leurs domestiques, ils comptent parvenir à leurs fins.
Les intérêts divergent.
Et la comédie se déroule, cruelle, charmante.
Le décor de Nicolas Sire lui ménage un ravissant écrin de toiles peintes, parfaite évocation des Fêtes galantes. Une escarpolette, à l'usage de notre coquette Hortense, ajoute à la grâce de ce cadre bucolique dans lequel s'harmonisent les costumes de Marion Bierry.
On regrette de ne pas sentir Bernard Menez à l'aise en marquis gauche et contraint, amoureux rogue et maladroit. Comme bridé, son indéniable talent ne s'exprime pas pleinement dans ce beau rôle comique.
Valérie Vogt nous campe une comtesse aux formes très généreuses et au tempérament de Madame Sans-Gêne qui ne s'accordent pas vraiment au personnage.
Marion Bierry est Hortense. Son personnage requiert une légèreté, un agrément, seulement affectés dans son interprétation. Gilles Vincent Kapps est le chevalier.
De loin les plus convaincants, les plus justes, les plus spirituels, Estelle Andrea, Lisette, et Sinan Bertrand, Lepine, les serviteurs. Jeunes, séduisants, enjoués, ils ont une vraie présence en scène, et le même naturel dans les parties parlées aussi bien que dans les passages chantés.
Et l'on revient à Labiche dont tant de pièces s'accompagnent de refrains écrits par l'auteur.
Quelle tocade s'est emparée de Marion Bierry pour nous gratifier de tous ces couplets chantés (vers de Ronsard, nonobstant) qui viennent interrompre de si parfaits dialogues.
Un souci pédagogique pour éclairer nos pauvres esprits obscurs.
Une de ces trouvailles furieusement à la mode.
Parasites du texte uniquement.
Mais au royaume des aveugles les borgnes sont roi.
Après tant d'éprouvantes soirées, on sort presque charmé par le spectacle de Marion Berry.