En ce sens, la représentation du »Lauréat » est déjà un succès.
Mené à un rythme enlevé, formidablement appuyé par le décor signé Catherine Bluwal et Stéphane Cottin, les lumières de Marie-Hélène Pinon, et l’accompagnement musical de l’époque,
La mise en scène de Stéphane Cottin ne faiblit jamais, imprimant aux développements de l’intrigue l’intensité des situations contrastées traversées par chacun des personnages.
Harcelé par ses Parents qui n’ont de cesse d’ « exhiber » devant leurs invités leur fils brillant lauréat des concours universitaires , Benjamin, tel un héros « romantique », tourmenté par le sens de sa vie formatée, asphyxié par le carcan de son éducation, refuse obstinément de sortir de sa chambre.
Par ses avances non déguisées, l’intrusion de Madame Robinson, alcoolique épouse d’un proche ami des parents, viendra encore amplifier le trouble du jeune homme.
Leur liaison constituera le plaisant dérivatif aux états d’âme du jeune homme, négligeant ses études pour mieux satisfaire l’appétit de cette femme « transgressive », scandaleuse, en totale rupture avec le milieu de cette « upper-class » américaine, conventionnelle à pleurer, tristement matérialiste.
Tout basculera violemment quand Ben sera contraint, toujours par ses parents, de sortir Hélène la fille des Robinson.
La rencontre « obligée » des deux jeunes gens provoquera une succession de cataclysmes sentimentaux ravageurs, libérateurs:
L’ire implacable de Madame Robinson férocement opposée à cet amour naissant, l’inextricable situation de notre héros empêtré dans une situation intenable, et la fuite d’Hélène découvrant la liaison de sa mère avec son amoureux jusqu’à l’affirmation de Ben enfin affranchi.
Provocante, dominatrice, destructrice, impérieuse, Anne Parillaud, plastique stupéfiante, regard d’acier, silhouette impeccable, affiche toute l’autorité et la « feinte » assurance de la femme secrètement « malheureuse ».
Convaincant de bout en bout, le jeune Arthur Fenwick est remarquable absolument dans chacun des aspects de son personnage : indécis, touchant dans ses hésitations, et triomphant enfin dans sa soif de liberté partagée avec Hélène.
Marc Fayet, Françoise Lépine forment un couple de parfaits bourgeois bornés et fiers de la « réussite » familiale qui volera bientôt en éclats ; velléitaire, Jean-Michel Lahmi est Monsieur Robinson le mari bafoué et le père possessif, et Adèle Bernier, délicate Hélène grandie entre des parents sinistres, complètent parfaitement la distribution.
Très efficace, balayée par différents éclairages, à l’inverse de la traditionnelle tournette,
La cloison concave, avec porte et persienne, pivotant autour d’un plateau circulaire permet de découvrir de façon inattendue chaque changement de décor ;
N’oublions pas les costumes réussis encore signés Chouchane Abello-Tcherpachian qui a parfaitement habillé les personnages et déshabillé Anne Parillaud.
Production luxueuse, cette adaptation théâtrale, malgré l « histoire » un peu datée du film éponyme bientôt cinquantenaire, connait le succès depuis sa création à Londres en 2000 et à Broadway plus tard.
Elle devrait rencontrer pareil accueil à Paris aujourd’hui :
La soirée est fort plaisante,
L’ennui en est absent.