Parfaite réussite de l'exercice.
Arnaud Meunier signe pour ce texte une mise en scène remarquable.
Sobriété absolue. L'accompagnement envoutant du violoniste électro-acoustique Régis Huby et les lumières , plutôt les subtiles ombres de Nicolas Marie, lui confèrent toute son efficacité.
Anne Alvaro, grande, droite dans son long imperméable noir entre-ouvert, d'un ton posé, avec comme un voile sur la voix, nous fait le récit des divers " épisodes" de ses reportages durant la guerre de Tchétchénie.
Régis Royer, barbe ébène, présence impressionnante dans chacun des personnages qu'il interprète, lui donne la réplique lors des interviews et devient parfois aussi récitant.
Descriptions, entretiens, enquêtes auprès de tous les protagonistes nous livrent des tableaux aussi terrifiants qu'insoutenables de la situation. Des représailles les plus barbares aux attentats les plus sanglants, des violences exercées sur la population au cynisme le plus abject de certains chantages, des viols en série aux mépris le plus total des prisonniers de guerre tchéchènes, des fictions de propagande les plus éhontées diffusées par la télévision jusqu'à son arrestation par l'armée avec simulacre d'exécution dont elle "réchappe ", les témoignages se succèdent sans rien omettre.
Seule la lassitude finit par atteindre l'unique journaliste qui osa dénoncer sans faiblir les exactions de l'armée, les mensonges du pouvoir, la compromission absolue de ses confrères. Menaces et lettres anonymes d'insultes ne la feront pas céder pour autant.
Les consignes des organes de sécurité seront bien appliquées : éliminer les personnes non rééducables ".
Anna Politkovskaïa sera donc abattue dans son hall d'immeuble. Son assassin jamais identifié.
Magnifique hommage. On ressort ébranlé et l'esprit marqué.