Leur écriture sombre, elliptique, me fascine, je leur ai consacré déjà plusieurs chroniques admiratives.
Lars Noren fait partie de cette jeune génération.
Il en est peut-être le plus connu.
Jean-Louis Martinelli a déjà monté toutes ses précédentes pièces aux Amandiers. J'avoue ne pas les avoir vues.
Avec "Calme" je découvre Lars Noren.
Chez lui pas d'effet de style; l'écriture est limpide, l'action linéaire, les faits chronologiques.
Les trois heures de représentation nous plongent dans une névrose familiale généralisée.
A chacun la sienne, toutes sont exacerbées.
Nous sommes dans un hôtel déserté par les clients.
Le père alcoolique , est accablé par la maladie de sa femme et le poids de ses dettes qu'il est incapable de rembourser.
Les deux fils, des frères ennemis que tout oppose, s'affrontent en permanence.
L'aîné se dévouant à sa mère lui sacrifie sa propre existence.
Le cadet, en rupture, est de retour, après avoir déserté le foyer pour essayer de réaliser ses aspirations littéraires et artistiques. Il se montre plus tolérant envers son père.
La mère, courageuse, digne, essaie de faire face sur tous les fronts: la maladie, les conflits familiaux et les soucis matériels.
L'apparition, de loin en loin de la jeune et jolie employée de l'hôtel, apporte la seule note "lumineuse" à cette situation de fin" pour citer Jean-Louis Martinelli, le metteur en scène.
Tête d'affiche, Jean-Pierre Darroussin est entouré de comédiens qui savent parfaitement donner corps et cohésion à l'ensemble de cette famille qui se déchire, autant qu'elle se délite, à ces êtres qui ne survivront pas (les parents) comme à ceux qui en réchapperont (les enfants) avec le départ comme seule issue.
La superbe scénographie de Gilles Taschet, l'éclairage et les costumes réussis, confèrent une belle dimension "théâtrale" à cette oeuvre.
Lars Loren ne cache pas l'origine autobiographique de sa pièce, il nous l'expose sans fard, y aborde de nombreux thèmes: elle a sans doute un effet de catharsis sur l'auteur.
"Chacun cherche sa douleur, son identité, sa mémoire. Je cherche ma douleur, je ne connais rien d'autre. Il existe peut-être un endroit objectif, un compromis moins destructeur et plus calme. Je ne l'ai pas trouvé."
Voilà énoncé par le plus jeune des fils (l'auteur) une belle analyse de nos blessures d'enfance et les voies souvent douloureuses pour les assumer.
Il n'en demeure pas moins que ce spectacle aurait beaucoup gagné à être resserré.
A force d'être inlassablement répétés les thèmes de la solitude de chacun, de la culpabilité, de la libération de l'emprise des parents, de la folie... finissent par perdre de leur force et provoquent la lassitude chez le spectateur.
Les rangs clairsemés de la salle en étaient-ils l'illustration?