Immondice scénique.
Pour cette nouvelle production, la mise en scène a été confiée à l’américaine Lidya Steier, pour la première fois invitée à Paris.
Sûre d’elle, dans son interview, elle présente Salomé comme une: «terroriste»,
considère son corps comme «un champ de bataille», assénant que l’œuvre «n’a rien de sexy ou de sensuel»….
Nous pensions être prévenus.
Nos craintes dépassées,
Rien ne nous sera épargné.
En l’absence de chœur, la metteur en scène a «enrichi» le spectacle d’une troupe de figurants installés en surplomb du plateau, dans une grande salle du château.
S’y déroule avec un réalisme confondant, en présence du Roi Hérode et de la reine Hérodias, un festin partouzard sadomasochiste, l’alimente de jeunes et ravissantes personnes, montées nues mais agrémentées d’un ruban cadeau écarlate noué en cocarde au «centre» de leur postérieur.
«Après usage» , réduites en cadavres disloqués, ensanglantés, elles sont descendues pour être précipitées dans une fosse par des gardes que protègent des combinaisons de caoutchouc canari.
Le gore des meilleurs films d’horreur règne.
L’hémoglobine coule à flot.
Témoin silencieuse, Salomé ne perd rien de la scène.
Elle exige des gardes de voir Jochanaan, un prophète vertueux tenu enfermé dans les égouts par Hérode qui en a peur.
Eperdue d’amour, elle est prête à tout pour en obtenir un baiser, vif ou mort.
Face à son refus obstiné , Salomé, agenouillée sur la geôle de Jochanaan, se défoulera en s’adonnant longuement au plaisir solitaire.
Passons à l’acte suivant.
Oubliez l’érotisme.
Balayée la danse des sept voiles, scandale de la création,
plus trash, la nouvelle version regorge de détails affriolants..
La célèbre injonction d’Hérode, descendu de son "Olympe":
«Danse pour moi Salomé» débute par un tripatouillage-déshabillage sur le corps de la jeune fille agrippée aux cordes de la geôle de Jochanaan.
Le Roi lui fait perdre sa virginité à l’aide d’ un doigt dans sa culotte,
enchaîne gaillardement par une pénétration anale, reprise par l’ensemble des courtisans.
Je vous épargne la dernière scène ou la tête de Jochanaan roule sur le plateau, enveloppée dans un sac plastique ensanglanté poussée par une Salomé en chemise maculée d’hémoglobine et déchiquetée de haut en bas.
Dénonçons avec la dernière vigueur les costumes de «grotesques» expressionnistes néo-punk d’Andy Besuch qui pousse le raffinement jusqu'à accrocher des piercing décorés de pampilles sur les tétons d’une Karita Matila dépoitraillée, couvre de bijou de Bikers roi, reine et courtisans affublés de perruques géantes et de guingois.
Difficile devant une telle accumulation de hideur d’apprécier pleinement les voix des interprètes, loin de démériter: Elza van den Heever ovationnée, Karita Mattila redoutable mère dénaturée et Lain Paterson Jochanaan, ainsi que la direction de Simone Young.
Premières victimes de ces derniers outrages, le compositeur, sa superbe musique, le livret d’après Oscar Wilde, trahis sans scrupules.
L’absence de l’américaine au salut se conçoit aisément.
La volonté de réinterprétation touche à ses limites.