Voulue par Benjamin Millepied, cette entrée au répertoire programmée à Bastille conduit à une première question:
Après la soirée déjà consacrée à Balanchine avec un choix de chorégraphies plus que douteux dénoncé par Lulu dans sa chronique du 14 novembre 2017ce « Songe » créé en 62 par le Maître, n’a pas franchi les décennies et porte cruellement les stigmates de son temps.
Là où Neumeïer avait réussi à transcender le simple « récit » pour en donner une version aussi poétique qu’onirique, quintessence de l’œuvre shakespearienne, le ballet de Balanchine s’en tient au seul niveau platement narratif, agrémenté de force pantomimes, qui se révèle daté au-delà du supportable.
L’image de Balanchine n’en sort pas grandie, pis, elle met en relief le coté démodé comme pour desservir une mémoire au prétexte de l’honorer….Image heureusement démentie par le programme récemment donné en juin dernier au Chatelet par Le New- York City Ballet. Lulu du 1er juin 2016
Comme pour souligner encore cette impression poussiéreuse, les décors et les costumes de Christian Lacroix.
Certes le Balanchine Trust veille au strict respect d’orthodoxie.
Contraintes qui n’ont pas privé le couturier devenu décorateur de bénéficier de moyens comparables aux superproductions hollywoodiennes.
Les couleurs aussi vilaines et ordinaires que dans les premiers films en technicolor, on flirte entre Hollywood et Bollywood : rose crevette, turquoise clair, doré, bleu royal, forment le nuancier d’un rare mauvais gout.
Swarovski étant mécène de la production, le clinquant de ses cristaux se retrouve même sur le juste au corps de ce malheureux Puck transformé, scintillant de ses ors, en décoration de Noël.
Pas plus réussie la forêt de carton-pâte, dont les ramures se nacrent et bleuissent, où surgissent fleurs géantes découpées et bénitier boticellien pour trône de Titiana.
Quant à l’interprétation : aucune figure marquante à signaler dans la distribution de ce 21 mars, date pourtant symbolique du renouveau.
Exécutants appliqués, sans éclat particulier, les danseurs manquent de souffle d’inspiration, de cette grâce « naturelle » qui confère à leur art ce « plus » indispensable pour dépasser la seule performance
virtuose.
Faisant suite à d’autres déconvenues qui ont jalonnée la saison,
Confortée dans sa décision de ne pas se réabonner,
L’ennui et la déception ont conduit Lulu vers la sortie dès l’entre-acte,
L’odeur du formol lui étant insupportable.