Avoir réuni dans le même programme Balanchine, " le maître" et Millepied, " l'élève " nous donne une parfaite illustration de la " filiation" qui réunit ces deux chorégraphes.
Aucun signe de décrépitude pour ce Palais de Cristal juste rafraichi par les nouveaux costumes signés Christian Lacroix. Fluidité, grâce, élégance sont la signature de cet éternel séducteur qui vous fait succomber au charme intemporel de sa chorégraphie.
Quatre tableaux sans décor, marqués seulement par le changement de couleur des tutus et jutaucorps. Ouverture en rubis avec un jeune danseur très prometteur: Josua Hoffalt.
Couleur nuit pour le second: Aurélie Dupont, enchainant arabesques ou portée par Hervé Moreau, nous y enchante littéralement de sa grâce infinie, de sa délicatesse exquise. Attristant d'imaginer sa fin de carrière si proche.
Beaucoup moins réussi le vert luciole du troisième tableau. Pas davantage aidé par la soliste de ce soir là. Valentine Colasante est un " colosse " . Toute en puissance, sa force ne laisse guère de place à la légèreté. Pas vraiment le style balanchine..
Le rose nacré du dernier tableau est ce qu' il nous réserve de plus réussi, les interprétations des danseurs ne m'ont pas marquée
Il n'en demeure pas moins une délicieuse impression donnée par le maître. L'accompagnement de l'orchestre dirigé par Philippe Jordan pour interpréter la symphonie en ut majeur de Bizet y tient aussi une part importante.
Daphnis et Chloé: troisième chorégraphie pour l'Opéra de Benjamin Millepied dont j'avais déjà apprécié les précédentes.
Commandée par Diaguilev, la sublime musique de Ravel est servie par un orchestre et un chœur justement ovationnés à la fin du spectacle.
Benjamin Millepied parvient à la perfection à en illustrer toutes les nuances, les couleurs, les inflexions. Chorégraphie ondoyante qui épouse le souffle de la musique.
Pour composer son décor de plus spectaculaire effet,Daniel Buren recourt à des éléments géométriques qui s'intercalent entre les danseurs, descendant des cintres, y remontant , tantôt cercle, carré, triangle, ou rectangle, aux dimensions et couleurs évolutives.
Eblouissement du blanc immaculé pour les jupes corolles de filles cheveux dénoués et dos nus contrastant avec la simplicité des pantalons courts et des sweet-shirt des garçons dans d'excellents mouvements d'ensemble en ouverture.
Vaporeuse scène des Nymphes, quand couchées, leurs jambes émergeant de la gaze, dessinent, verticales, de très séduisantes figures.
Violence et dynamisme de la scène de l'enlèvement par les pirates , tous les garçons en noir maintenant.
Et, vous l'attendiez, les pas de deux entre Daphnis et Chloé: modernes et lyriques à la fois, joliment dansés par Laetitia Pujol et Mathieu Ganio. Mauvais esprit, je n'ai pu m'empêcher de regretter Aurélie Dupont et Hervé Moreau pour les interpréter.
Solaire, le final fait exploser tel un feu d'artifices, le turquoise, corail, safran, émeraude dans les éblouissantes envolées de l'ensemble des danseurs.
Ce n'est pas la première fois qu'un chorégraphe et un plasticien collaborent. Ici l'apport de Daniel Buren s'impose avec un éclat particulier, une justesse étonnante. Son intervention donne réellement une dimension supplémentaire au ballet .
Merveilleuse alchimie, parfaite osmose.
Superbe réussite de cette fin de saison.
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