C'est un ballet indigeste qui nous fut servi.
En cause, sans doute, la collaboration avec Jean Rouaud pour la dramaturgie. L'écrivain se targue de sa complète ignorance du sujet, et se vante de n'avoir jamais vu le ballet de Petipas.
Ainsi nous voilà entrainés dans sombres histoires d'inceste organisées par Rothbart devenu "Majesté de la Nuit", mère du cygne noir .
Quant au Prince , se sont ses peurs d'enfants qui le poussent à trahir son serment fait au cygne blanc pour épouser sa demi-soeur.
Devenu personnage principal de cette version, entourée de ses deux Archanges des Ténèbres, cette Majesté nocturne, Maude Sabourin, nous inflige d'interminables pas" menaçants " exécutés non sans talent, mais d'un kitch lassant souligné par des acolytes qui ressemblent à des lutteurs de foire.
Que dire des deux cygnes disgracieux ainsi vêtus d'affreux baby-doll, pauvrement parsemés de quelques rares plumes et terminés en short flottant. Comme victimes de malformation, pour parfaire l'allégorie, de longs gants d'où pendent à l'extrémité des doigts quelques tristes plumes qui s'agitent mollement au bout de leurs bras.
Au sublime Acte II on atteint l'acmé du ridicule avec un de corps de ballet tout droit sorti du poulailler, d'espiègles plumets s'agitant sur la croupe des danseuses comme aux Folies Bergère.
Aucun trouble ne nous effleure, aucun mystère ne plane sur cet échange maudit.
Pourtant élève de John Neumeier, dont l'interprétation si équivoque du " Lac" reste gravée dans toutes les mémoires, Jean-Christophe Maillot nous livre tout juste une jolie " revue" qui traine en longueur.
Si Ernest Pignon Ernest a réussi une salle du trône à l'épure superbe, sa forêt est digne des rochers du zoo de Vincennes.
Philippe Guillotel, hormis quelques jupes plissées-soleil fendues haut sur la cuisse, n'a pas mieux réussi ses autres costumes. Quant à ses choix de couleurs, ils blessent la rétine par leur assemblage clinquant..
Le remarquable niveau de la troupe, et plus particulièrement de certains solistes comme Mimoza Koike, la Reine, Maude Sabourin citée plus haut, Stephan Bourgond, le Prince, et Jeroen Verbrugen formidable Confident du Prince, illustre la qualité des danseurs des Ballets de Monte-Carlo dirigés par Jean-Christophe Maillot.
Que n'a-t-il été mieux inspiré ?
Pulvérisée par Tchaïkovski
Son " Lac" a fait " pschitt".