Seul Antonin Artaud, cité dans le programme, en célébra les violences, la luxure, les transgressions sexuelles et politiques, « L’anarchie au point où Héliogabale la pousse c’est de la poésie réalisée »écrit-il.
Pour sa première mise en scène d’opéra, le flamboyant Thomas Jolly a surpris, d’aucuns diront « déçu ».
Economie et élégance en sont la signature.
Jouant essentiellement sur l’éclairage (Antoine Travert) :
Rais de lumières dessinent l’espace au scalpel, faisceaux entrecroisés créent les ambiances dramatiques et intimes.
Pour scénographie, un unique praticable noir, télescopique, monté sur rail.
Faisant ressembler Eliogabale à un personnage de Star-War( souci de visibilité » ?) les costumes de Gareth Pugh flattent davantage les dames vêtues de longues robes à l’antique, sobres et élégantes.
Face à un empereur dépravé, violeur, pervers, meurtrier, sans foi ni loi, uniquement préoccupé de ses plaisirs charnels, Thomas Jolly souligne admirablement l’humanité de ses victimes.
Déchirés, humiliés, souffrant, sœur ou fiancée de preux généraux poussés au meurtre par désir de vengeance se confronteront lors de duos qui composent les plus beaux moments de la soirée d’une authentique émotion.
Autre passage marquant, la manifestation de mauvais augures avec la présence maléfique et mystérieuse autour du festin de créatures oniriques, poétiques et menaçantes : d’extraordinaires hiboux géants.
Paul Groves , Alessandro, et Nadine Sierra, Eritea sa fiancée, forment un couple dramatiquement très convaincants, plus touchante que vocalement éblouissante, la belle Elin Rombo en Eritea, Mariana Flores interprète une Attilia enflammée, et Valer Sabadus est un Giulano un peu falot.
Peu sensible aux rôles d’Eliogabale , de Lenia et Zotico, la prudence me commande l’abstention de tout jugement de valeur concernant Franco Fagioli, Emiliano Gonzalez Toro et Matthew Newlin.
Spécialiste reconnu de la musique baroque, et unanimement salué, Leonardo Garcia Alarcon à la tête de la Cappella Mediterranea, parvient avec talent à nous faire entendre toutes les subtilités et les nuances de cette œuvre de Cavalli oubliée depuis trois siècles.
Aussi curieuse de découvrir cette forme musicale que le travail du metteur en scène de théâtre, Lulu se contentera de cette expérience.
Pendant plus de trois heures de spectacle, l’exercice comporte des longueurs.
En pâtissent inévitablement plaisir et attention.