«Sans limite, Intemporel, Flamboyant, Supranaturel.»,
«Couturissime», sous-titre de l’exposition, ne saurait mieux lui convenir..
Combien d’autres superlatifs pourraient suivre.
Emblématique de son sens du spectaculaire et de son imagination sans borne, la robe de l’affiche, ouvre l’exposition.
Dominatrice, sanglée dans un fourreau d’écailles, corsetée de métal, et surmontée d’une coiffure en ailes d’oiseau noir geais,
le mannequin affirme la puissance d’une femme insecte, vénéneuse et sensuelle.
Qualifié par les uns de «post-moderne», de «futuristes» par les autres,
Pour Lulu une seule certitude:
Hormis le démesure, le délire de certains thèmes abordés pour les shows, (collection «Buick» aux tailleurs agrémentés d’ailes de voiture en métal et couleurs voyantes),
Thierry Mugler a célébré une femme sublimée, magnifiée, sexy mais libérée.
Corps moulée, taille de guêpe , épaules de «super héroïnes», décolletés vertigineux, osant jusqu’à l’audace de fesses dénudées émergeant d’un sublime drapé bénitier, fentes provocantes,
Voici la femme qui, pour reprendre la formule d’une rédactrice d’un grand journal américain:
« N’est plus un objet sexuel, mais un acte sexuel».
Virtuose, époustouflant, le couturier expérimente avec une confondante maestria, les matériaux les plus insolites.
Des pneus pour ce tailleur inouï à la basque rebondie, pochette assortie,
Du rotin ficelle pour cette veste arachnéenne, transparente, à la forme ultra simple, mais «muglerissime».
Le verre ou le plexiglas agrémentent ses revers, poches, manchettes.
Travaillé, découpé, le métal cuirasse ses tenues futuristes ou robotiques pour Barbarella de luxe.
Loin de se cantonner aux créations «expérimentales», Thierry Mugler se révèle aussi «maître» d’un classicisme jamais convenu.
Qu’il taille les écailles de sa frêle et délicate sirène dans un broché argenté,
Parsème une combinaison chair de gouttes de verre luisant comme une rosée,
Orne l’intérieur de poignets ou la doublure d’un manteau d’un pavage de pierreries multicolores,
Crée un fourreau tout de paillettes blanches aux spirituels motifs noirs bordant le décolleté, dessinant les hanches, soulignant la chute des reins.
Il incruste des pétales d’organza sur un sobre tailleur en grain de poudre,
Accompagne de somptueuses capes théâtrales ses fourreaux de velours et satin assortis.
Ses corolles frémissantes comme des ailes de papillon, accompagnent, couleur géranium, un deux pièces tout en fausses pierreries, se déploient, retenues par deux fleurs posées sur le pubis, en géant «éventail» de plumes noires aux feuillets moucheté de velours, surmontent un étourdissant académique bustier brodé de strass et jais, jaillissent en plumes roses d’une longue jupe de velours noir pour encadrer un bustier tout de paillettes pétale.
S’il flirte, avec le mauvais goût pour une tenue de cow- boy tout en strass grenat au pantalon fendu,
L’indécence de ses fourreaux chair, entièrement transparents, sont prétexte aux plus virtuoses et ravissantes applications de broderie noires, de dentelle, de passementerie.
Traînes en quilles confèrent aux robes longues grâce, féminité;
Flocons de neige planent sur le dos d’un spectaculaire manteau d’hiver ; un autre , tout de poils de singe et lanières de cuir, étrangle la taille au-dessus d’une généreuse et virevoltante jupe à godets.
Ses tailleurs noir, d’une parfaite élégance architecturée, s’égaient d’une note d’humour quand un petit nœud retrousse le bas d’une stricte jupe droite, ou qu’une pochette-cercueil tient lieu de sac.
La séduction s’affiche dans ses parementures blanches posées sur un joli décolleté basculé découvrant à peine une épaule, sinon en demi-lune, au bas de manches.
Impossible de ne pas évoquer sa Vierge flottant dans une.robe de mousseline blanche brodée d’une étincelante étoile d’argent, reprise au creux de ses mains implorante;
Sa mythique «Angel» à l’opulente chevelure blonde platine, ses boys, ses filles en body de trip- teaseuses,
Exposés dans l’ultime vitrine, Les costumes créés pour «Lady Macbeth»., mise en scène par Jean-Pierre Vincent au Festival d’Avignon en 1985;
Comme encagés, cuirassés, baleinés, l’or pare Lady Macbeth avant de découvrir une simple robe de chiffon, de géantes fraises en latex enserrent le cou des sorcières, les lanières de cuir cloutées gansent robes et pourpoints des nobles.
Terrifiantes cuirasses, «Symbole de la faiblesse cachée des personnages»
Une note sombre.
Elle ne doit pas faire oublier le credo affiché du couturier:
«Faire des vêtements pour un futur meilleur, un futur plus joyeux»
Réalisé au-delà de ses espérances, cette exposition enchante.
Un moment de vrai rêve «Couture».