Discrète, sa présence se remarque dès l’entrée.
Quelques boutons dorés sur le caban bleu marine des débuts éclairent avec élégance ce vêtement strict. «J’aime les boutons dorés, je crois que se sont les bijoux de jour d’une femme» déclare Yves Saint Laurent.
Aussi éléments pour souligner la ligne d’un vêtement des touches dorées souvent se déclinent en simples accessoires, bottines gants, chapeaux, pour parfois devenir «œuvre d’art» tel le buste sculpté par Claude Lalanne, véritable bijou-corps.
Autres parures de jour, présentes dans les collections, les chaînes. En d’infinies variations, elles occupent toute une vitrine.
Ainsi le déclarait Yves Saint Laurent:
«Du noir moderne, je l’allume toujours avec de l’or, en boutons, en ceintures, en chaînes»
En phase avec à son époque, durant les «swigging sixties» Saint Laurent imagine de nouvelles lignes pour ses robes. Droites, sans marquer la taille et gommant la poitrine, elles dévoilent davantage les jambes. Présentées ici, les tenues de cocktail raccourcies découvrent les jambes, parfois habillées de collants en lurex ornés de paillettes dorées. Facilitant le mouvement, ces tenues habillées sont l’image d’une femme moderne, libérée.
Le podium de la salle suivante présente un ensemble époustouflant de tenues du soir.
Etourdissante illustration de l’imaginaire et de la culture du couturier, l’or règne sur les ensembles d’inspirations diverses: russe, pour ce manteau de boyard en broché cloqué or, espagnole, dans ce divin ensemble de «torero», jupe-cape amovible de taffetas pierre de lune sur culotte en lamé damasquiné , complétée sa veste soulignée de fourrure. Céleste, une longue veste de velours noir scintille d’une myriade de broderies or.
«J’aime la fête,
c’est gai,
ça étincelle, ça pétille»
Déclare Yves Saint Laurent.
Un préambule à la suite de l’exposition: la célébration de la nuit parisienne dont le couturier a longtemps été une figure marquante.
A l’étage, alignés sur deux rangées, scintillent véritablement une série de modèles étincelants de virtuosité et de glamour.
Spécialement remarqué pour sa fluidité féminine, un long fourreau d’ organza doré, drapé, et noué à la taille, une incroyable et spectaculaire robe rouge laque brillant, épaules entièrement dénudées et longues manches bouffantes, ou l’élégantissime et sobre robe longue noire barrée asymétriquement depuis l’épaule d’une écharpe or qui la ceinture et se termine en un long pan sur la jupe.
Le légendaire smoking, symbole d’une femme émancipée, androgyne qu’a toujours célébrée Yves Saint Laurent, se détache de l’ensemble.
En regard, ce mur entièrement tapissé de photos d’époque du couturier noctambule entouré de ses proches (Betty Catroux, Loulou de La Falaise)
Passons au studio.
Seul, présenté sur son Stockman( mannequin) un éblouissant cardigan entièrement rebrodé de fils d’or aux motifs alternant les losanges, souligné d’une bordure aussi brodée noir et or, que ponctue à l’encolure, bas de veste et manches une longue pampille de soie noire.
Revenus au rez-de chaussée, dans un étroit passage, deux vitrines sur fond noir, rendent un vibrant hommage à Loulou de la Falaise. Bracelets et bagues enfilées sur de longues barres gainées de velours noir, colliers sur leur présentoir , boucles d’oreilles flottant, s’échelonnent, s‘alignent, s’enroulent en un véritable foisonnement baroque d’une folle diversité.
Hommage encore, l’évocation de Schiaparelli sur ces deux vestes- poèmes qui lui sont dédiées: le paletot «Soleil» en l’honneur de Jean Cocteau, et la veste brodée du nom de Louis Aragon au dos, et des grands yeux d’Elsa sur le devant.
Essentielle pour les deux créateurs, leur rencontre avec la littérature et la poésie confère une
véritable dimension artistique à la Couture.
A mentionner encore, sélectionnée pour l’affiche de l’exposition, la longue robe entièrement de paillettes or à l’encolure et la taille serties de pierreries multicolores. Rigide derrière l’écran de verre qui la protège, elle prend soudain vie, portée sur le mannequin photographié par David Balley dans une pose mutine, ultra décontractée, longues boucles ruisselant dans le dos.
Bouquet final et véritable apothéose: les vidéos des défilés projetées sur de petits écran, hélas.
Froufroutantes, virevoltantes, défiantes, conquérantes, triomphantes, superbes dans leur tenues entièrement accessoirisées, chapeaux et bijoux, les mannequins souveraines nous donnent la pleine mesure de la perfection de l’élégance Saint Laurent
Elle ne finira jamais de nous éblouir,
de nous faire rêver,
Lulu la première.
Précurseur, Saint Laurent alchimiste inspiré, transforme le plomb en OR.