Glanés de –ci de-là,
Notés au gré de sa fantaisie et de ses humeurs,
Non sans omissions :
Echos de la Fiac 2017.
Le lendemain jeudi, à l’heure de l’ouverture, sous un soleil radieux, l’entrée dans la grande nef encore déserte se déroule dans un calme plus propice.
Face à nous, la galerie Sprüth Mager avec des œuvres monumentales :
En fond de stand, les enroulements de feutre rouge et noir de Morris ; dressé verticalement au centre, un panneau de verre jaune bouton d’or est soutenu par une ardoise dépliée tel un livre ouvert de José Davila à l’extérieur un étrange rideau écarlate dont la déchirure centrale forme deux excroissances terminées en pointes d’Otto Pien.
Un portrait d’homme terrifiant de George Condon n’est pas sans rappeler le style de Basquiat, le même artiste américain se retrouve à deux pas chez Skarstedt.
En face, au mur de Kaufmann Repetto, comme brodées en relief, les abeilles de Pae White butinent une immense tenture d’un délicat coloris : entre kitsch et raffinent oriental.
Chez König Gallery, Alicia Kwade hérisse un fond blanc de clous rouge dressés symétriquement en différents sens ; les ceintures tressées, fermées de lourdes boucles forment un ensemble « sanglé » de Monica Bonvicini ; un panneau jaune de José Davila apporte la sérénité.
Posées sur de hauts piliers quadrangulaires, les têtes hyperréalistes d’Isabelle Bortolozi animent le stand de Nagel Drexler qui présente aussi un monochrome d’Hemo Zobernig.
Un Gunter Forg dans les gris me séduit fort tout comme « DNA Sepia » trois toiles à effet de treillages recouvrant leur surface en transparence sur les motifs de Mcarthur Binon chez Massimo Carlo, première galerie où je prends plaisir à m’arrêter.
Chez Vitoria Miro, Secundino Hernandez présente trois tableaux au fond blanc traversés de zébrures beige, ocre noires qui ne manquent ni d’élégance ni de lyrisme.
Autre univers sur le stand voisin : Jeppe Hein, tendance et ludique, lance au plafond de 303 Gallery sa collection de ballons baudruches, gouttes métallisés et multicolores à rubans blanc. Trop hauts pour que l’on puisse les attraper…
Deux artites reconnus chez Paula Cooper : un Donald Judd fait de carrés blancs alvéolés, losanges de Sol Lewitt.
Contrastant avec le calme général, la foule des grands jours se retrouve chez Perrotin. L’or scintillant de la haute flamme torsadée de Murakami, face à l’entrée principale, attire tous les regards, au mur un des plus vilains Hartung vu à ce jour.
Gladstone présente dans sa boite de plexiglas l’alignement des longues franges de laine noire de Rose Marie Trockel ; une série de photos de Mapple Thorpe ne scandaliseront personne.
Abel Abdessemed, moins présent cette année, interpelle cependant chez Dvir Gallery avec son dessin d’homme hurlant.
Blum et Poe créent le spectacle avec la formidable installation de balais et bidons de Henri Taylor qui expose aussi ses portraits.
Grands classiques dans l’ensemble de Lelong : bel Alechinsky coloré, tout comme le Gunter Forg aux touches riantes comme griffonnées ; sculpture de bois naturel strié de David Nash, un « Penseur » de Plensa immédiatement reconnaissable, bons Dubuffet, et Toguo, jeune recrue à succès.
A l’extérieur du stand d’Almine Rech une toile surchargée de lourdes et épaisses touches en relief verdâtres et rouge de Zhu Jinshi constitue une rare illustration de laideur absolue. Quelques protubérances dressées composent l’installation d’Arlene Sechet. N’oublions pas les caniches pour loges de concierge d’Ernst Wilheim Ney, sauf erreur de ma part.
Sans aucun lien esthétique, soudain le monochrome blanc légèrement étalé en trois large bandes terminées par un « bourrelet » sur la rugosité apparente de la toile du coréen Han Chong Hyun apporte sa note d’abstraction années soixante. Déroutante Almine Rech depuis ses débuts à des lieues de cette « peinture » et soudain convaincue…avec l’exposition de 2017 à la galerie.
Fergus McCaffrey présente une intéressante suite de quatre plaques d’acier de Richard Nonas travaillées de la rouille jusqu’au rouge et jaune, et des toiles abstraites de Marcia Hafif qui se laissent regarder.
Par snobisme, ou sens commercial, chez Cardi aucun nom d’artiste n’accompagne les œuvres. Délicat de s’enquérir face à l’anonymat ériger en règle : regrettable pour les créateurs.
Nathalie Valois, toujours fidèle à Niky de Saint Phalle, Tinguely, et César ouvre cependant sa présentation par « les Fantômes hawaïens » kitch à souhait de Gilles Barbier.
Beaucoup de monde encore chez Nathalie Obadia. Une jeune collaboratrice enthousiaste s’approche aussitôt pour m’offrir ses services alors que je regarde une œuvre de Fabrice Hyber. J’emploie ses compétences pour m’éclairer sur une tête de cygne en verre moulé, ornée de coquillages et dissimulée par de longs filaments de Rina Banerjee, une artiste indienne qui donne à ses œuvres des titres longs comme un roman : banale confusion des genres.
Chez Pace devant un panneau de papier peint surchargé, Raquib Shaw nous gratifie d’un cerisier en fleurs aux racines monstrueuses ; perchés sur ses branches d’affreux petits personnages, inspirés sans doute par les frères Chapman hantent également les œuvres avoisinantes du même artiste.
Guillermo de Osma, de Madrid, a réuni une splendide sélection d’artistes espagnols: Tapiès, Saura, Millares, Chilida.
Un beau Delaunay, « Tour Eiffel » de 1925, est présenté sur les cimaises du Minotaure, un amusant papier de Swchitters a été composé à partir de factures manuscrites sur feuillets à en-tête disséminées sous leur cadre de verre, de petite dimension un Julio Gonzalez conserve intactes toutes ses qualités.
Entre les deux stands, la galerie Venus et son Peter Saul aux couleurs criardes à souhait ne se remarque que mieux.
Edward Tyler Nahem peut se vanter d’avoir tout, tout, tout de la peinture américaine : Roy Lichenstein, Jacky et Fleurs de Warhol, Basquiat, un impressionnant Joan Mitchell, médiocre cependant, et trahison… un Dubuffet égaré outre-Atlantique.
Maîtres italiens chez Tornabuoni, diptyque blanc et écarlate de Fontana, belle craquelure blanche d’Alberto Burri ; racées, deux sculptures de l’uruguayen Pablo Atchagarry dressent leur belle stature de marbre blanc pur, noir intense. L’œuvre puissante, hérissée de clous entourant une fêlure de la toile, est d’un allemand, Günter Ueccker.
Un crocodile de Keith Haring s’est glissé chez Van de Weghe.
A l’entrée de Nathalie Seroussi une étroite vitrine aligne joliment un petit mobile de Calder suivi d’une éponge bleu Klein, un Lygia Clark d’acier jouant du demi-cercle cercle replié en triangle ; la toile tendue sur châssis noir et nouée en son extrémité me permet de découvrir le poète et artiste péruvien Jorge Eduardo Eielson génération des années cinquante ; un Torres Garcia se décline en noir et blanc ; toujours si délicats, tels d’imperceptibles mouvements de cils vibratiles, seules les extrémités d’un des deux Pol Bury, « Points Rouge », « Points Blancs » animent la surface de ses fonds noir profond.
Applicat Prazan demeure le champion français des années cinquante.
Remisés dans un coin, deux très petits Nicolas de Staël, des cieux clairs, me semblent bien supérieurs à sa grande toile exposée à l’entrée ; un Millares de toute beauté arrache et déchire sa toile d’incarnat et de noir, une « Ville » de Veira da Silva se découpe suivant son style si personnel ; d’une folle gaité, « Printemps en Hollande », un Manessier de la plus belle facture fait éclater ses vifs coloris.
En face Landau Fine Art accumule sculptures, dessins et tableaux de maitres. Muséal. Compter quatre millions et demi de dollars pour une « Famille » d’Henry Moore de dimension modeste. Rien n’interdit la contemplation des Picasso, et Marini ; encadrant l’entrée, Dubuffet semble occuper la place vedette.
Thaddeus Ropac offre ce qui se fait de mieux, de plus cher, de plus chic.
Un superbe Baselitz soudain lyriquement abstrait dans de très beaux gris lavande me parait supérieur à sa tête d’oiseau renversée ; en grisaille imposant « Déjeuner sur l’Herbe » de Pei Min, célébrissime aujourd’hui ; inhabituel, une simple plaque de bronze corrodé signée Rauschenberg; en résonnance avec l’exposition actuelle, un postérieur dénudé d’Irving Penn semble anecdotique.
Autre galerie phare : White Cube. Tendance oblige, des tours modernes sont emprisonnées derrière les grillages symétriques de Liu Wei ; grande plaque d’acier traversée par un rail duquel dépassent des chiffons froissés de Kounellis ; incontournable, la vitrine de médicaments de Damian Hirst ; tellement plus subtil Gabriel Orozco déploie ses couleurs sur fond or; rustique, écologique, le panneau de bardeaux en bois naturel de Theaster Gates, un artiste que je ne connaissais pas encore. On y retrouve, plus modestement représentée, les petits personnages laids et inquiétants de Raquib Shaw vu déjà chez Pace.
Déjà vu également chez Almine Rech, le coréen Han Cheng Hyun se retrouve chez Kukje Gallery cette fois dans les gris, toujours maitrisé, sobre, élégant j’ose le dire ;
Contraste surprenant, dressés à l’oblique, deux cordages rigidifiés émergent de leur socle en débris, installations de Mircea Kantor lauréat 2011 du Prix Marcel Duchamp ; ainsi Tatiana Trouvé s’y retrouve en bonne compagnie.
Annely Juda Fine Art présente un nid bien représentatif du travail de Kawabata, un triptyque rouge éclatant de David Nash et surtout une petite « structure –sculpture » en fils transparents tendus en différentes formes géométrique de Nam Gabo. Ovale, au mur un évidement de courbes entrecroisées de Nigel Hall en bois poli doux à l’œil.
Fidèle à ses artistes maison, se retrouvent comme toujours, à La Galeria Continua( il faut aller absolument à Boissy-Le -Chatel pour ceux qui ne connaissent pas encore) Kader Attia qui présente côte à côte une tête de pierre dont le visage pourrait être Staline avec une bouche difforme et un masque d’art premier en bronze ; Pistoletto aligne six miroirs aux bords ondulant sur fond de différentes couleurs vives…Pascal Martine Tayou est présent avec ses têtes en verre pendues à des branches, Anish Kapoor expose son énième cylindre concave, bleu morne cette fois, et de taille modeste ; à l’extérieur, un lambeau de rayures noirs et blanches sont du Buren pur jus.
Templon vieillit et s’agrandit.
Son gout demeure inchangé. Nous ne partageons pas les mêmes, à l’exception de sa toile de Philippe Cognée qui surprend entre un Pinocchio de Garouste, le couple black très chromo de Wiley, un plâtre érotique triste de Segall, la succession par ordre décroissant de grosses caisses superposées de Navarro, le bouddha ornementé kitsch encore de Schawl ,sauf erreur de ma part; Jan Fabre illustre à merveille la « poésie » réaliste socialiste avec son monumental « Homme qui mesure les nuages » juché au sommet de son escabeau un mètre rigide au bout de ses bras tendus vers le ciel, bronze rutilant doré.
Je n’ai pu tout noter, mais la caravelle emboitée derrière les fils incarnats de Shiaru Shiota ne m’a pas échappé au sortir du stand.
Claude Viallat trône en majesté chez Ceysson et Bénétière.
Représentés un peu partout, Hundai de Séoul réunit exclusivement des artistes du Levant. Lee Ufan, à tout seigneur tout honneur. Les graffitis en crayon ou encre noire zèbrent les papiers kraft de Lee Kun Yong, Shin Sung Hy, vu ailleurs déjà, recouvre de ses pointillés légers sa toile brute, pas mal du tout ; Yun Hyong Keun, déjà remarqué chez Almine Rech, attire mon regard à nouveau avec « Burnt Umber » et « Ultra-Marine » dynamiques et belles trainées noires laissant sa toile à peine dénudée au centre et sur ses bords.
Horreur, Kamel Mennour et Gagossian Gallery resteront les grands oubliés de cette Fiac 2017 ;
C’est vous avouer ma fatigue ; après plus de trois heures de visite, une chaleur de serre ayant envahi le Grand Palais, a eu raison de ma vigilance ;
Dernière mention pour l’installation des grillages arachnéens déployés dans une débauche de formes diverses et non sans grâce par l’argentin Tomas Saraceno qui crée le buzz cette édition 2017 chez Esther Shipper Gallery