Fluidité et expressivité, aisance sidérante et technique absolue, en harmonie totale avec le corps de ballet, éblouissant dans ses solos, saut en apesanteur (il "volait" déjà dans le Spectre de la Rose), mouvements coulés au sol et dans les airs.
Dénué de toute affectation, alliant grâce et élégance, expressivité et précision, avec Nicolas Leriche, il est assurément notre meilleur danseur étoile du moment.
Talent rare, le souffle de la beauté irradiait la partition de Stravinsky illustrée par Béjart il y déjà quarante ans.
Lubricité inquiétante, érotisme impudique jusqu'à l'orgasme, contrastant avec une gestuelle inspirée de l'antique , le faune de Nicolas Leriche n'a rien perdu du côté transgressif et brûlant de la création de Nijinski qui fit alors scandale.
Douze minutes de danse incandescente que ni les décors, ni les costumes d'époque ne viennent tempérer.
Inaltérable.
Inaltérable encore "Afternoon of a Faune" de Robbins, mais tout en fraîcheur, en poésie, en délicatesse et en imaginaire.
Hervé Moreau a bien le charme d'une jeunesse rêveuse.
Eléonora Abbagnato apporte avec la blondeur de blé de sa longue chevelure dénouée, toute la douceur de cette rencontre amoureuse.... peut-être rêvée.
Plus troublant, plus déroutant "Le Boléro" dernier ballet de la soirée, création pour l'Opéra de Cherkaoui-Jalet, très attendue.
Marina Abramovic signe une très belle scénographie avec les lumières d'Urs Schonebaum: un immense miroir incliné en fond de scène reflète en fonction de l'éclairage ou des projections les pupitres de l'orchestre, une surface d'eau étale, des spirales géantes qui tournent sur elles-mêmes.
Les costumes de Riccardo Tisci sont beaucoup moins séduisants. Même masque dissimulant tous les visages. Pour les filles comme pour les garçons, même longue jupe à godets en tulle blanc bordé de satin qui virevolte légèrement et finit par s'envoler laissant voir des justaucorps blancs à dessin de squelette.
La chorégraphie enfin: délibérément à l'opposé de celle de Béjart, elle se veut d'après les auteurs "une sorte d'élévation à l'envers, de transe inversée".
Et tout tourne en effet: les danseurs sur eux-mêmes, puis l'un autour de l'autre, par couple garçon-fille, garçon-garçon, fille-fille.Et les spirales projetées au sol et reflétées sur le mitoir, to
Enroulements sans fin, danse macabre ou danse de derviches tourneurs, ce Boléro lassant et non lancinant, a donné mal au coeur aux interprètes durant les répétitions.
Le public n'est pas complètement épargné. J'avais le tournis à la fin du Ballet et n'ai pu distinguer dans la troupe Aurélie Dupont et Marie-Agnès Gillot méconnaissables ainsi grimées et costumées.