La pièce, jugée blasphématoire aux yeux des intégristes catholiques, avait provoqué leur ire manifestée par de violentes perturbations des représentations.
Quatre années plus tard, c’est Aubervilliers qui reçoit le sulfureux auteur- metteur en scène argentin installé en France.
A l’époque ( Lulu de janvier 2011) j’avais jugé le spectacle plutôt inventif et inoffensif, soulignant déjà quelques longueurs et redondances.
Ce retour était attendu avec curiosité.
En dépit d’un titre alléchant « Et balancez mes cendres sur Mickey » ne tient pas les promesses du début de la représentation :
Trois comédiens,( deux hommes debout, une femme assise en fond de scène, une voiture garée sur le plateau) sont savamment reliés entre eux par des cordes entrelacées qui prendront feu tandis qu’ils nous décrivent un univers de commerces déshumanisés, aseptisés et « maquillés » où nous serons bientôt amenés à faire nos courses : magasins de chaussures ressemblant à des boutiques de C.D. ou parfumeries qui seraient telles des boulangeries. Absurdité comique d’une société de consommation poussée à son paroxysme, visant à provoquer la confusion chez le client déstabilisé.
Le deuxième tableau ne manque d’humour non plus : une séance de plaisir masculin solitaire, le sexe de l’homme n’étant que le bras dénudé de la femme glissé entre les jambes de pantalon du monsieur. Puis la main de la dame, pouce déplié, devenu l’ astucieux support 'une tablette, sortie d’un sac pour égrener une musique synthétique facilitatrice d’aboutissement.
Incongrue et cocasse scène de désert affectif.
Bien plus poussifs, reprenant aussi des épisodes déjà très présents dans son précédent spectacle, on n’échappe pas à la reprise de passages où les comédiens entièrement nus s’enduisent de miel, y collent des tranches de pain de mie ou se vautrent dans des plumes.
Aussi répétitives les scènes d’immersion dans la piscine de peinture blanche suivies de sauts, trébuchements, chutes , et éclaboussure du public.
Plus dérangeante le passage de l’aquarium avec la fausse noyade à répétition de deux souris blanches repêchées dans une passoire.
Qualifié d’artiste « radical » Rodrigo Garcia tente ainsi nous faire prendre conscience de l’inéluctable chute de notre société, de nos solitudes, de la fin d’un monde occidental décadent et perverti.
Simultanément énoncé et projeté sur écran géant, le propos de l’auteur, terriblement bavard, se perd vite en discours fumeux, prétendument philosophique, et prétentieux.
Bientôt les images-choc qui l’illustrent ne parviennent plus à dissiper l’ennui qui s’en dégage.
Il y a comme du Trissotin contemporain chez Rodrigo Garcia.
Le talent de ses nombreux compatriotes argentins ont tôt fait de l’éclipser.