Depuis sa reprise du Théâtre Hébertot, Francis Lombrail a su, le plus souvent, nous proposer des spectacles « à suspens » très réussis, régulièrement salués dans ces chroniques :
« Les cartes du pouvoir » (Lulu de septembre 2014), « A tort ou à raison », « Douze hommes en colère » (Lulu d’octobre 2017 élu LULU d’OR) repris cette saison, enfin « Misery » (Lulu de novembre 2018).
« 7 Morts sur ordonnance » s’inscrit dans cette lignée.
Le spectacle se veut efficace, haletant, populaire au sens noble du terme.
Rien qui ne puisse effaroucher Lulu attribuant un « LULU d’OR » en octobre 2018 à « Douze Hommes en colère ».
L’unique décor de Jean-Michel Adam, plateau nu, trois marches à jardin, parois en quinconce, porte coulissante au fond (décor de Jean-Michel Adam) sur lesquelles sont projetées les lumières fortes et violentes, rouge, vertes, jaunes de Laurent Béal pour intensifier l’atmosphère soulignée encore par la création sonore de François Peyrony forment l’univers « abstrait » de cette sombre histoire de concurrent à « neutraliser ».
Le milieu médical n’échappant pas à la loi du profit, l’élément vient renforcer la noirceur de l’intrigue :
Brézé, propriétaire de la Clinique Sainte Marie, dans laquelle exerce aussi, avec plus ou moins de talent toute sa famille, voit d’un mauvais oeuil les patients délaisser son établissement au profit de l’hôpital public où opère un brillant chirurgien.
Frappé soudain par un infarctus, cet accident de santé fournira le prétexte idéal au patriarche pour évincer ce praticien gênant.
A partir de cet évènement, le chirurgien ne connaitra plus un moment de tranquillité.
Propositions de contrat mirifiques précèdent insinuations douteuses, menaces à peine voilées, chantage à la délation à l’ordre des médecins, jusqu’à la conspiration organisée et la trahison pure et simple du secret médical
Résistant sans faiblir à toutes les tentatives de chantage exercées sans relâche par le vieux Brézé, la pression se faisant toujours plus forte, les ruses plus ignobles, les découvertes plus terribles, notre noble et irréprochable chirurgien finira aussi tragiquement que son confrère.
Mais auparavant, dans cette atmosphère délétère et à partir de la mort accidentelle par arrêt cardiaque de la femme du commissaire avant une opération, il aura progressivement découvert, entre confidence du veuf et questionnement d’un ami psy, les terrifiantes circonstances qui ont conduit son confrère au suicide, victime déjà du chantage du redoutable Brézé qu’il pensait dominer.
Toujours très apprécié dans ses précédents rôles, Claude Aufaure incarne l’ignoble Brézé.
Verbe policé, élégance de notable affichée, onctueux, tout en persuasion doucereuse, le personnage se révèle un impitoyable adversaire qui jamais ne renonce à sa proie.
Trop tendre et délicat, fantomatique, le comédien ne semble pas véritablement à sa place.
Répétitives, ses apparitions lassent,
Comme lassent la suite de tableaux qui découpent l’action avec un Bruno Wolkowitch juste, et une distribution dominée par Francis Lombrail dans le rôle du commissaire accablé de douleur, premier à briser la loi du silence.
Tiré du film éponyme, on ne peut s’empêcher de trouver datée, comme les films policiers français de cette époque révolue, la pièce portée sur scène.
La mise en scène « trépidante » d’Anne Bourgeois n’y fait rien.
Empoussiérée, encroutée, il flotte sur le plateau comme une odeur tristement vieillotte
De polar ringard.
Un conseil : Pour tous ceux qui ne l’ont pas encore vu,
Changez d’horaire : Précipitez-vous dans ce même théâtre, à 19h :
La reprise de « Voyage avec ma Tante » vous fera passer une soirée merveilleusement loufoque, vous y découvrirez un Claude Aufaure à son sommet, parfaitement irrésistible à l’instar de ses autres camarades.