Lumière zénithale, parcours dépouillé sur moquette claire succèdent aux décors somptueux des anciennes manifestations, quintessence du luxe affiché.
Sur la centaine de participants, quelques temps forts et coups de cœur à vous faire partager.
Si la peinture y tient une place pré-dominante,
Honneur aux grands antiquaires spécialistes de XVIIIe, trop peu représentés cette année… Chez Guillaume Léage, la grâce et la splendeur d’un candélabre à cinq bras de lumière, attribué à Caffieri rivalise avec de somptueuses consoles rocaille surmontées de trumeaux richement sculptés. Rare exemple du goût très en vogue encore au début du XVIIIe, ce riche paravent en cuir dorée. |
Non loin, fidèle à son style, Steinitz scande les accès à son stand de bustes romains dressés devant des panneaux peints au décor de puttis et guirlandes encadrés de lambris.
L’ amateur de porcelaines XVIIIe et de meubles rococo doit s’attarder chez Röbbig de Munich. Dans cet espace d’une exceptionnelle richesse, avec ses vitrines débordant de trésors, le service en Meissen d’Elisabeth décline un décor fleuri différent sur chacune des assiettes Sur une délicieuse table dressée sous un frais kiosque en croisillon, les couverts se distinguent par leur manche de fine porcelaine. Les meubles ne font pas davantage défaut, notons la singularité de cette petite commode-console de Dubois avec réemploi comme souvent à l’époque d’un précieux panneau en laque de Chine à fond noir. |
Chez De Jonckheere nous admirons depuis de longues année ses Jérôme Bosch et Breughel toujours largement à l’honneur.
S’en détachent deux petits portraits de Lucas Cranach, Luther et de Ktharina Von Bora, et en peinture française un Corneille de Lyon , portrait de gentilhomme.
Majoritaires, les galeries de tableaux confèrent à la peinture une place prépondérante.
Face à l’entrée, côte à côte, Almine Rech et Applicat Prazan en donnent l’immédiate illustration. Rien d’affolant chez la première : un Poliakoff terne côtoie le coréen Ha Chong-hyun, un artiste vedette qui n’hésite pas à signer un sac Lady Dior.
Contraste chez Applicat-Prazan. Le galeriste nous a habitués à l’excellence. Sa sélection de toiles modernes, beaucoup se rattachant à l’école de Paris, demeure par sa qualité, une les plus intéressantes du salon. Un Soulages noir et blanc, prochainement exposé au Musée Fabre de Montpellier, un superbe Veira da Silva « L’Exode » s’imposent au premier regard.
Encadrant l’autre côté de l’allée on ne peut manquer chez son confrère Alain Marcelpoil cette armoire- cabinet particulièrement originale de Jean Royère agrémentée des vitraux de Max Ingrand et admirer à nouveau le très complet salon d’André Sornay avec son bureau avec en arrière-plan
Côté joaillerie, le genevois Larengregor présente un sublime collier en émeraudes de Cartier. Une bague de Jean Desprès retient encore l’attention, sans parler du collier-libellules de Lalique déjà présenté l’an passé.
Les anglais aiment les fleurs, c’est bien connu.
Voilà pourquoi se détachent chez le londonien Richard Green le rafraîchissant bouquet de Fantin-Latour, et la rare nature morte « roses, iris, jacinthes, jasmin » du jésuite Daniel Seghers célèbre élève de Jan Brueghel le vieux .
Elles voisinent avec cette spectaculaire jardinière art nouveau, « La Mer », en grès émaillé de Dalpayrat et Adèle Lesbros présentée par Trebosc et Van Lelyveld
Superbes illustrations miniatures indiennes, d’un Ragamala ou iranienne d’école d’Ispahan côtoient de nombreux objets d’antiquités d’art d’Orient ou d’Islam chez Kervokian.
Peu exposée cette année la haute époque. Chez Sismann, une Vierge à l’enfant du Tyrol, vers 1340 la jolie paire d’anges porte-candélabres attribués à Romano Alberti d’Italie du Nord en illustrent toute la qualité.
De la même époque, chez le spécialiste de la peinture flamande Pelgrims de Bigard une « tentation de Saint Antoine » de Hieronymus Bosch et, le très émouvant petit dyptique d’une Annonciation d’un Maître anonyme du Brabant,
Cependant voir chez Stéphane Clavreuil deux exemplaires des « Fleurs du Mal » de Baudelaire, une première édition originale, et une seconde augmentée de trente-cinq poèmes suscitent l’émotion. à l’instar des miniatures illustrant ce livre d’heures de Paris vers 1500 sans omettre l’exceptionnelle suite complète de seize planches des « Prisons » du Piranese .
Les amateurs de gravures, dont fait partie Lulu, n’auront pas manqué d’être saisis par l’horreur face à l’« Agarrotado » (le Garroté) de Goya chez Prouté
Réunissant les plus grands maîtres, très importante série d’ eaux fortes présentées chez Helmut H. Rumbler: plusieurs Rembrandt, dont ce nu féminin suivis encore de quelques Durër, par exemple : « Adam et Eve ».
De la bonne époque, chez Brame & Lorenceau, un Hartung de 1948 ne passe pas inaperçu. Produisant le même effet, les quatre Zoran Music, dont un auto-portrait chez Ditesgheim & Maffei, galeristes fort peu accueillants.
Pour compléter cette énumération, exact reflet la place accordée à la peinture, signalons les nombreux Picasso chez Jean-François Cazeau, entre autres ce masque singulier et ce Minotaure prédateur de la suite Vollard.
Evoquons enfin une fascinante « Chauve-Souris » de Germaine Richier en bronze naturel proposée chez de La Béraudière
En conclusion de cette longue et attentive visite, il ressort comme un sentiment d’uniformité, voire de monotonie, l’impression d’une édition « étriquée » , trop franco-française renforcée par si peu de présences étrangères.
Le rétablissement du rythme d’origine, tous les deux ans, ménagerait un nouvel effet de surprise.