Voilà dix ans, en Mars 2015 (voir Lulu) nous nous esclaffions à « Shitz », du même auteur, dans l’irrésistible mise en scène du belge David Strosberg. au Théâtre Bastille.
Cet univers de grotesques, de minables, vus au prisme d’un humour noir et d’une certaine tendresse ne pouvait que séduire Valérie Lesort.
Après les enchanteurs Contes de Perrault, « Que d’Espoir, Cabaret théâtral » lui permet de déployer cette fois son singulier talent de plasticienne au service de la charge caricaturale.
Bienvenue au royaume de l’outrance, de la dérision, des rêves déçus.
Des surprises vous attendent, effets visuels et le comique sont au rendez-vous.
Chef d’œuvre de l’absurde, voyons comment un vieux libidineux enfouit les seins pendants de sa voisine dans son chapeau miraculeusement transformable en « cabas à pommes » avant que la dame, triomphante, ne le lui vole, convaincue que :
« Le chapeau semble résoudre tous les problèmes » et d’ajouter :
« Fini les emmerdes ».
A l’occasion d’un dîner, découvrons comment une innocente demande de sel adressée à son épouse déchaîne chez elle une fureur incontrôlable à l’encontre de son mari face à l’invité interloqué.
Grandiose moment, il se conclut par un jerk endiablé entre les hommes dans une boite pour garçons.
L’intempestive incursion dans la salle d’un travesti en femme de ménage, Hugo Bardin coiffé d’une flamboyante perruque à rouleaux, bousculera le public.
Hissée sur scène, voilà la technicienne de surface intarissable, entamant le récit des maux qui l’accablent. Telle une épopée épique, aucun détail scabreux ne nous est épargné.
Sans tout dévoiler, apprenez encore qu’un Malabar, muscles saillants, se prenait à rêver qu’à l’hôtel quelqu’un viendrait le border dans son lit,
et qu’une fausse Brigitte Bardot, voix d’idiote, formes exagérément rebondies, commande un hot-dog en débutant systématiquement chacune de ses phrases par « Je voudrais bien que …» véritable litanie de ses rêves les plus fous dans une vertigineuse progression au cœur de ses fantasmes.
Je vous laisse aussi découvrir la jalousie dévorante de vieilles commères,
et l’incompétence d’un faux magicien découpeur de spectatrice …
Pas de cabaret sans musique : excellent, Charly Voodoo, est au piano.
On ne regrette que davantage la sono trop forte. Elle nous prive du texte des chansons qu’il accompagne.
Rythmé par le rideau en plastique transparent strié de rais de lumière, touche glamour décalée, les numéros s’enchaînent.
Dans les décors réduits à l’essentiel, voire suggérés, jouant sur les couleurs acidulées,
Coiffées de leurs perruques toutes extravagantes, corps délibérément déformés par les prothèses de mousse, costumes ridicules, tous signés par la talentueuse Carole Allemand,
Ces caricatures vivantes, farcesques, donnent tout leur relief aux personnages d’Hanokh Levin.
L’auteur n’hésite pas à forcer le trait,
Dans le miroir déformant de Valérie Lesort, ses personnages atteignent au burlesque tragique.
Il se résume dans le dernier tableau,
Un malheureux assailli de :
« L’angoisse de vieillir et de mourir »
en dépit de ces vains efforts,
en subit les conséquences aussi pathétiques que… triviales.
Malgré quelques faiblesses,
Une rare occasion de tant rire sans rougir.
Amateurs de parodies et de satires, précipitez vous.
Duo au sommet entre auteur et metteur en scène.