Un Maitre à l’apogée
Mais impatiente de découvrir les dernières créations de notre éphémère Directeur de la Danse de l’Opéra de Paris, Benjamin Millepied,
Devant la prétention et la vacuité du programme présenté au Théâtre des Champs Elysées,
Accablée par la succession d’effets éculés et de prétentions affichées : impression de déjà vu, pseudo « liberté » laissée aux danseurs ne conduisant à rien qu’à l’ennui, recette éculée de la salle de répétions pour décor, projection vidéos géantes sans apport dramatique, laideur définitive des costumes,
la musique interprétée sur scène constituant la partie la plus réussie de la soirée,
Lulu, allant jusqu’à douter de son attirance pour la danse,
A préféré s’abstenir de chronique après ce spectacle.
« Gravité » d’Anjelin Preljocaj vient fort à propos la détromper
« Splendeurs en apesanteur », ce ballet, n’ayons pas peur des mots, est un chef d’œuvre.
Au sol, comme soulevés par le souffle d’un doux zéphir, tels une gracieuse jonchée de brindilles éparses, les danseurs, se dresseront doucement, membres élégamment éployés.
Poétique, végétale, ou graphique, éblouissante de grâce, cette fluidité onirique règne sur Gravité.
Subjugués, transportés, emportés, le chorégraphe nous entraine dans un univers galactique, organique : nous baignant d’ineffables images, beauté, sérénité, vie palpitante irradient.
Pour accompagner les interprètes :
Espace graphique, cercles, rectangles ou carrés dessinés au sol par les lumières superbes d’Eric Soyer, aussi utilisées en fond de scène en rais découpées,
Musique de Bach, Ravel, Xenakis, Chostakovitch s’intercalant entre enregistrement faits dans l’espace, du Daf Punk ou Philip Glass,
Dans une démonstration d’une inventivité saisissante, associant notions classiques d’élévations et recherches sur le poids, l’espace, la vitesse présentes dans la danse moderne,
Angelin Preljocaj, abandonnant dans cette création tout récit narratif,
Nous offre une fascinante grammaire renouvelée :
Déclinaison de portées avec appuis utilisant hanches, coudes bras et exécutées par les filles comme les garçons,
Et Jeux de bras d’une absolue beauté, debout comme au sol :
« Dans Gravité, mes danseurs jouent avec le poids qui caractérise le mouvement, luttent contre, comme s’ils traversaient des planètes aux gravités différentes. Ils sont très virtuoses, c’est assez difficile à faire » énonce simplement le chorégraphe.
Non avons eu le bonheur d’en vivre la démonstration.
Impossible de tout vous décrire,
Reprenant une des figures du début, le cercle ondulatoire et vibrant du Boléro de Ravel en constitue un des sommets.
Un quart de siècle après avoir créé « Le Parc » à la demande de Brigitte Lefèvre pour l’Opéra de Paris en 1994,
Epure sublimée, stellaire, « Gravité » atteint à la quintessence de la danse,
Un éblouissant exercice,
Inscrit d’office au firmament de cet art.
Loin de tout essoufflement, Angelin Preljocaj conserve un génie inspiré.
Depuis longtemps, une des plus belles soirées de balletomane.