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Le Dindon de Georges Feydau mise en scène d’Anthony Magnier, avec Anthony Magnier, Magali Genoud, Xavier Martel, Julien Renon au Théâtre Dejazet.

8/12/2019

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A glousser de rire.
Si dans ses chroniques Lulu n’a de cesse de dénoncer les trahisons des classiques, fruits de relectures aussi mégalomanes qu’injustifiées,
Voilà une soirée qui la réjouit, une bien jolie surprise à inscrire en tête de liste des nombreux Feydau actuellement à l’affiche, dont «La Puce à l’Oreille» de la Comédie Français, délibérément absente de ces colonnes. 

Anthony Magnier nous présente un Dindon, certes rajeuni, mais avec une intelligence qui
nous permet de complètement savourer chaque réplique du l’auteur, en mesurer la folie, la  mécanique infernale, les situations burlesques, les quiproquos absurdes et rire de ces personnages, bourgeois, joliment dépoussiérés.

L’intrigue repose sur l’engagement définitif pris par Lucienne Vatelin, épouse exemplaire, qui promet de « fauter » qu’en cas d’adultère avéré de son brave mari.
Il n’en faut pas davantage à son soupirant, Rédillon, le bien nommé, et à Pontagnac, patenté séducteur,  tous deux la poursuivant de leurs assiduités pour mettre sur pied le stratagème qui leur permettra de combler leurs désirs: faire succomber Lucienne.

Ajouter au quatuor l’intrusion inopinée de l’épouse vengeresse de Pontagnac, bien décidée à faire payer ses infidélités à l’ époux volage et l’arrivée imprévue, plus pressante que jamais, de l’ancienne maîtresse anglaise de Crépin Vatelin, une innocente incartade commise Outre-Manche.

Acculés,pris au piège par ces dames, ces messieurs, entraînés dans une spirale délirante, crescendo de folies débridées, deviendront le « dindon » de ces dames, trébuchant de traquenard en chausse-trappe . Mari menaçant, vieux couple de provinciaux, cocotte, valet dévoué, viendront compléter de leurs personnages, tous irrésistibles de drôlerie, le chef d’oeuvre de Feydau.

Ce petit monde s’agite au milieu de décors où un canapé Chesterfield, deux banquettes Louis XV, puis un lit dans  l’incontournable chambre d’hôtel, éléments fort bien utilisés, suffisent à dessiner le cadre de l’action sous les variations de lumières et d‘éclairage de Stéphane Balny.

Melisandre de Serres a conçu les costumes, jolie synthèse de moderne et «d’époque».
Inattendue, surprenante, une musique rock sert d’illustration sonore à certains moments de l’intrigue.

Pas de bon Feydau sans bonne distribution.

Celle-ci nous fait découvrir de jeunes interprètes dirigés avec un sens du théâtre de tréteaux qu’il revendique par Anthony Magnier, aussi sur scène dans le rôle de Pontagnac.
Comme je viens de l’écrire, le metteur en scène a su imprimer jeunesse et justesse dans sa direction d’acteurs, à la fois respectueux de l’auteur dont il sait souligner tous les effets comiques, ils sont innombrables, et conférer une subtile touche de modernité à l’interprétation qui, sans jamais trahir l’esprit de Feydau, le rend plus familier pour la jeune génération.

Un tour de force, une performance bien trop rare pour ne pas être soulignée.
En Pontagnac, Anthony Magnier confère à ce de coureur de jupon son assurance affichée, une suffisance non déguisée, un aplomb déconcertants, menteur démasqué soudain mis à mal par une épouse vindicative.
Savamment dosés, mimiques et gestes à l’appui, sa composition « colle » parfaitement au personnage.

Magali Genoud, objet de ses désirs, est une Lucienne idéale:
Jeune, jolie, désirable, cheveux ramenés en chignon de côté, caraco de velours noir sur longue jupe de satin blanc, aussi fidèle à son mari qu’à sa détermination dans l’application de la loi du talion en cas d’adultère, hésitante enfin quand prise à son propre piège, et enfin comme soulagée d’en réchapper.

Quant à Monsieur Crépin Vatelin, mari de Lucienne, ce brave notaire, homme rangé, toujours sage sauf en Angleterre:
«Il y a des choses qu’on peut faire d’un côté du détroit mais pas de l’autre» se justifie-t-il,
Xavier Martel lui confère toute sa rondeur bonasse, sa balourdise, son aveuglement et son embarras grandissant face à son ex- maîtresse venue le relancer chez lui, enfin sa peur soudaine en présence de l’époux anglais décidé à divorcer après avoir confondu sa femme.
Le Dindon, c’est lui. Juste, jovial, complaisant, empêtré, paniqué, garçon de tout côtés dépassé.

Remarquable les compositions de Julien Renon.
Son chic britannique aux indispensables touches d’excentricité, son maniement de la canne à pommeau, ses cheveux plaqués, son accent anglais impeccable accentué par ses expressions aussi appuyées qu’évocatrices, en font un Soldignac d’anthologie dans sa fureur de mari jaloux cherchant à confondre sa Maggie en goguette avec pour témoin ce malheureux Vatelin.
Plus tard, en Jérôme, le valet dévoué, veillant sur son maître comme s’il était encore enfant, il réussit à donner à ce personnage, qui pourrait paraître anachronique, toutes les attitudes contraires à son emploi: familiarité, remontrances, plaintes, désobéissance aux instructions sont énoncées avec semblant de déférence ou componction résignée, hilarantes.

Laurent Paolini est un Redillon acrobatique. Vindicative, Marie Le Cam en Madame Pontagnac puis  sourde en Madame Pinchard. Delphine Cognard  est l’insistante Maggy l’anglaise avec ses  délicieuses bévues de vocabulaires avant de se muer en Clara, la torride cocotte, consolation de Redillon.

Ainsi monté et joué, Feydau demeure un maître du rire,
Bravo la Compagnie Viva, la bien nommée,
on lui doit ce désopilant Dindon.
Il s’impose au menu des fêtes.
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