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Le Déni d’Anna de et mise en scène d’Isabelle Jeanbrau, avec Benjamin Egner, Karine Hugenin, Matthias Guallarano, Cécile Magnet et Thibaut Wacksmann, musique Daniel Jea.

13/4/2017

1 Commentaire

 
Démunis,
Délivrés
​Avec le rire en prime, voici résumé les sentiments qui vont habiter, «  hanter » les protagonistes si véridiques, pathétiques, émouvants de cette famille confrontée à la disparition d’une trop jeune maman vaincue par la maladie.
Le temps d’un éclair, trois photos posées en préambule, résument avec esprit et vivacité l’évolution d’un deuil qu’on imagine impossible.
Un premier tableau déjà hilarant réunit pour le diner, Diane et Mathieu, encore enfants, en compagnie de François leur père.
Pour annoncer à ses enfants la fin prochaine d’une mère agonisant dans la pièce voisine, donnant le change en s’affairant à table, visiblement nerveux, il ne trouve d’autre mots que « ça ne va pas très fort, et ça ne va plus aller: de façon sure, ça va faire mal » avant de renchérir, affirmatif et rassurant,  « mais tout va bien pour vous » face à la mine déconfite des petits.
A la mort de la maman, lors de l’échange téléphonique avec les pompes funèbres, le père accueillera  l’horaire proposé pour la levée du corps par «  Onze heures ? Parfait,  je pourrai faire les courses avant » et de conclure «  Merci, bonne journée pour vous aussi ».
Le ton est donné.
Le décalage adopté.
Il faut bien continuer à vivre.
Ces ahurissantes banalités, telles une antidote, un exorcisme, serviront d’échappatoire, d’esquive, de «  déni » à cette insurmontable épreuve.
Au comique récurrent qui émaille force repas de famille où personne n’écoute personne, où incompréhension et maladresses caractérisent les échanges, le rire, suscité par des répliques déconcertantes de drôlerie, nous révèle bien des douleurs, mieux que gémissements et larmoiements.
Quand se manifeste l’émotion profonde, elle n’est que pudeur et retenue :
Admirable et bouleversante scène du réveil des enfants le matin de la mort de leur mère avec cet homme désemparé, qui, comme pour un coucher, borde fébrilement leurs draps, les lissent soigneusement sur eux, avec amour, éperdu, tout en leur disant de se dépêcher pour ne pas arriver en retard à l’école.
Poignant aussi le moment où le frère la sœur, demeurent seuls, abandonnés, livrés à eux-mêmes face à leur chagrin, incrédules , impuissants, égarés, silencieux.
Il faudra vingt ans aux enfants devenus adultes, avec une nouvelle scène inénarrable, pour que soit enfin franchie une étape décisive :
Leur volonté d’enterrer l’urne de leur mère.
L’annonce sèmera l’embarras : disparue de l’étagère des toilettes du Papa, encore leur faudra-t-il trouver l’endroit où Sophie, la seconde épouse à qui cela « pesait de voir ça tous les jours ; ce n’est pas fun » l’a dissimulée.
 
Une réunion au cimetière, un an plus tard pour l’entretien de la tombe, évoluera en pique-nique surréaliste, photo de famille sur la tombe en prime.
La réconciliation arrivera dans un court moment d’émotion soudain exprimée.
Restés seuls au cimetière, à la vue de larmes jaillissant pour la première fois des yeux de son père, Diane pourra à son tour, par un simple  geste de compréhension, lui exprimer sa profonde tendresse.
Délivrés, enfin.
Souligné par la musique originale de Daniel Jea, en partie autobiographique, ce texte corrosif, rythmé, sensible, sous-tendu par un vrai développement dramatique, est signé d’un jeune auteur réellement talentueux, Isabelle Jeandrau, aussi dans sa mise en scène au cordeau, parfaitement découpée.
Sur le plateau, on est heureux de retrouver Cécile Magnet tant admirée dans « C’ta ton tour Laura Cadieux » en mère inconsolable, obsédée par la nourriture, souffrant « d’isolement » pas toujours tendre avec son gendre.
Dans son aveuglement obstiné, ridiculement «  pratique », focalisé sur ses «  courses » volontairement réfugié dans son train-train quotidien, Benjamin Egner incarne avec une rare maitrise le difficile rôle du père.
Merveilleux dans les deux registres, enfants et adultes, Karine Huguenin et Matthias Guallarano, sont Diane et Mathieu. Blessés, terriblement, mais solidaires et courageux c’est d’eux que viendra la «  guérison ». Innocents, Frais, candides, spontanés, sincères, déconcertants parfois, leur interprétation évolue en parfaite adéquation avec leurs personnages.
En oncle, «  subissant » sa maman, Thibaut Wacksmann campe comme il le faut ce personnage plus effacé, lointain.
 
Fatiguée par une succession de déconvenues sur de très grandes scènes parisiennes,
C’est au Lucernaire que Lulu a retrouvé le sourire.
Le spectacle peut paraitre «  scabreux » ?
Il est salutaire, hilarant, et profond.
Enfin du bon théâtre.
1 Commentaire
Breitner
13/4/2017 02:56:28 am

Bravo Lulu pour votre commentaire, on a vraiment envie de voir ce spectacle

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